Olivier Père

De sang froid de Richard Brooks

ARTE diffuse De sang froid (In Cold Blood, 1967) de Richard Brooks lundi 29 juin à 22h30.

Le 15 novembre 1959 à Holcomb, petite ville du Kansas, deux jeunes repris de justice assassinent froidement une famille d’agriculteurs, sans autre motif que l’argent.

En 1966, Truman Capote publie De sang-froid : récit véridique d’un meurtre multiple et de ses conséquences, un roman non-fictionnel. Capote, frappé par la violence de ce fait divers, décide de quitter New York et part enquêter sur les lieux du crime. Il recueille les témoignages des habitants de Holcomb et de la police locale, mais aussi des deux meurtriers dans leurs cellules. Il assistera aussi à leur exécution par pendaison le 14 avril 1965. Le livre est dès sa publication considéré comme un chef-d’œuvre de la littérature américaine. Le réalisateur et scénariste Richard Brooks décide de l’adapter au cinéma l’année suivante, avec la complicité de son auteur. Le film est fidèle au livre dans la mesure où ce dernier adoptait déjà un style très cinématographique, attaché à la notion de réalisme dans la description des faits et les portraits psychologiques des différents protagonistes de ce drame, et plus particulièrement les deux assassins, marginaux atteints de plusieurs tares physiques et mentales. Brooks procède par retours en arrière et décide d’éluder dans un premier temps la scène du meurtre, qui n’est dévoilée que tard dans le récit, une fois les deux coupables arrêtés et interrogés. En choisissant de tourner sur les lieux-même des faits et de l’enquête, en optant pour une forme éclatée qui présente plusieurs points de vue, ou la technique du montage parallèle, le cinéaste prolonge l’écriture réaliste et chorale de Capote, sa recherche d’une explication rationnelle à un crime atroce perpétré de sang-froid. Par son intensité dramatique, le film échappe aux écueils du film à thèse, même s’il prend clairement parti contre la peine de mort en établissant un parallélisme entre la pendaison des deux coupables et l’exécution de leur crime, et en soulignant la déficience du caractère exemplaire de la peine capitale. En cela, il diffère du roman. La mise en scène de Richard Brooks a rarement été aussi inspirée. De sang froid doit beaucoup à ses interprètes, les débutants Robert Blake et Scott Wilson. Le film permet également d’admirer l’une des plus belles photographies (noir et blanc) du grand chef-op Conrad Hall, ici au sommet de son art.

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