Tandis que s’organise en coulisses le grand retour de la comédie musicale dans le cinéma d’auteur français, avec Léos Carax et son Annette en éclaireurs, suivi des prochains films de Serge Bozon, Arnaud et Jean-Marie Larrieu, Noémie Lvovsky…ARTE.tv nous permet de revoir Les Chansons d’amour (2007) de Christophe Honoré, dans lequel le cinéaste plonge aussi bien dans son histoire intime que dans le souvenir des films de Jacques Demy, François Truffaut et Jean-Luc Godard. Honoré dépasse l’exercice d’admiration ou l’hommage transi et procède à une véritable réappropriation de l’univers enchanté de Demy, et de la liberté insolente des débuts Nouvelle Vague. Le film est segmenté en trois chapitres qui reprennent les intitulés des Parapluies de Cherbourg : Le départ, l’absence, le retour. Ce n’est plus la guerre d’Algérie qui sépare les amants mais la mort soudaine d’une jeune femme à la sortie d’un concert. L’arbitraire tragique du deuil fait irruption dans un récit volage de ménage à trois entre Parisiens insouciants. Le film se nimbe alors d’un voile mélancolique qui marque la fin d’une adolescence prolongée. Les Chansons d’amour marie avec beaucoup d’élégance une forme de réalisme documentaire – le film enregistre la vie des quartiers de Bastille et de Château d’eau où habitent les protagonistes – et un goût de l’artifice cinématographique – variations de vitesse de l’image, inserts de photos en noir et blanc, effets empruntés à Demy que lui-même avait pris à Cocteau. Le moindre de ces artifices ne sont pas les chansons d’Alex Beaupain qu’entonnent les personnages dès qu’ils doivent exprimer leurs sentiments. Christophe Honoré dresse alors le tableau générationnel du désordre amoureux, ou plutôt de la réinvention du couple et du désir, en atténuant les frontières sexuelles.
Disponible gratuitement sur ARTE.tv du 1er avril au 30 septembre 2020.
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