Olivier Père

Sous le sable de François Ozon

Pour inaugurer un cycle dédié à François Ozon (en quatre films), ARTE diffuse Sous le sable (2001) dimanche 1er septembre à 20h55. 

Sous le sable marque la rencontre entre Ozon et Charlotte Rampling. L’actrice anglaise, moins présente sur les écrans dans les années 90, réussit un retour éclatant sur le devant de la scène cinématographique grâce à Sous le sable. Ce film, considéré à juste titre comme un immense succès personnel pour Rampling, a aussi beaucoup compté dans la carrière de François Ozon. Il a affirmé le talent d’un jeune cinéaste confiné à ses débuts dans la provocation et le kitsch, et qui a appris à gérer de mieux en mieux les ingrédients d’un cinéma du désir, de la cruauté et de l’étrangeté. Sous le sable dessine le portrait sensible et émouvant d’une femme désemparée après la disparition de son mari. Le film débute en montrant un couple d’âge mûr, qui passe de paisibles vacances au bord de la mer. Alors que Marie (Charlotte Rampling) dort sur la plage, Jean (Bruno Cremer) disparaît. On ne saura jamais si son mari s’est noyé ou s’il a pris la fuite. Marie devra apprendre à se reconstruire dans la solitude et à continuer à vivre avec cette absence. Les premières scènes, qui soulignent le mutisme du mari, laissent planer le doute d’une conjugalité déjà éteinte, assoupie par le poids des années. Le corps massif de Bruno Cremer continuera de planer sur le film comme un fantôme. Ozon est un cinéaste cinéphile, adepte des dispositifs ludiques ou des fictions introspectives, qui cherchent à percer un mystère. Il y a toujours chez Ozon un film caché à l’intérieur du film, une référence secrète. Sous le sable reprend le motif de l’évaporation d’un personnage, cher au cinéma moderne et dont L’avventura de Michelangelo Antonioni constitue une forme de matrice, et l’exemple le plus célèbre. Mais Ozon a souvent exprimé sa réprobation envers le cinéma d’Antonioni, jugé trop formaliste et hautain, et se sert de L’avventura comme d’un contre-modèle. Il procède même par inversion. Ce n’est plus une jeune mondaine qui disparaît au large des iles éoliennes, éveillant l’inquiétude puis l’indifférence de son entourage, mais un homme dans la force de l’âge, dont le souvenir va continuer d’obséder son épouse. Si Antonioni inventait un récit autour du vide pour stigmatiser un monde en train de perdre ses repères, Ozon se concentre sur la psychologie d’un personnage féminin en souffrance dont il étudie les moindres sensations, les moindres émotions. Son propos est moins large, mais il est plus intime. Maître d’un petit théâtre comportemental qui peut parfois basculer dans l’onirisme ou le mélodrame distancié, Ozon reste fidèle à son vrai cinéaste d’élection, Rainer Werner Fassbinder.

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