Olivier Père

Flic ou zombie de Mark Goldblatt

Encore une séance de rattrapage. On la doit cette fois à l’éditeur Bach Films, qui propose une salve de cinq films tous distribués aux États-Unis par New World Pictures, et qui constituent un échantillon significatif du cinéma bis américain dans la seconde moitié des années 80. Productions indépendantes mixant action, horreur, fantastique, comédie et science-fiction, ces films perpétuent la recette instaurée par Roger Corman des films de genre à petits budgets, d’abord exploités en salles mais destinés à faire le plus gros de leur chiffre d’affaires en VHS, au temps de l’âge d’or des vidéoclubs. Parmi ces titres, le plus intéressant est peut-être Flic ou zombie (Dead Heat), réalisé en 1988 par Mark Goldblatt. Il s’agit du premier long métrage de Goldblatt, célèbre monteur dont la contribution au nouveau cinéma d’action américain est essentielle. Sans lui, les séquences explosives des films de James Cameron (Terminator, True Lies), Paul Verhoeven (Starship Troopers) ou des productions Joel Silver (Commando, Predator 2, Le Dernier Samaritain) n’auraient jamais atteint le même seuil d’efficacité. Les deux seules incursions de Goldblatt comme metteur en scène témoignent de son goût pour un cinéma musclé et violent, mais aussi de sa cinéphilie et de son affection pour la série B, comme Joe Dante avec lequel il débuta (Piranhas, son premier film en tant que monteur en 1978). Nous avons déjà parlé dans ce blog de Punisher (1989) adaptation convaincante d’une bande dessinée Marvel avant que Hollywood ne s’empare de cette manne hyper-lucrative. Flic ou zombie est une modernisation du thème des réanimateurs de cadavres cher au cinéma fantastique, qui s’amuse à mélanger des ingrédients horrifiques et d’autres typiques du polar. Le film profite avec opportunisme de deux succès qui engendrèrent de nombreuses suites et imitations : L’Arme fatale (1987) et Re-Animator (1985). Le scénario de Flic ou zombie est signé Terry Black, frère de Shane Black, auteur de L’Arme fatale et de nombreux « buddy movies » représentatifs d’un nouveau cinéma « pulp » américain dans les années 80 et 90. Flic ou zombie plonge un duo d’enquêteurs de la police de Los Angeles dans une affaire de criminels morts vivants. Les recettes de la vague du « gore comique » sont scrupuleusement appliquées : humour scabreux et gras, action non-stop, effets répugnants qui déclenchent autant le rire que le dégoût. Des trucages mécaniques réussis et inventifs, et des fusillades bien réglées permettent au film d’échapper à l’indigence. On ne souvient des deux flics attaqués par les victuailles d’un restaurant chinois soudainement ressuscitées (canards laqués, porcelets) ou d’assaillants zombies impossibles à tuer parce que déjà morts. En cadeau, une des dernières apparitions de Vincent Price dans le rôle d’un savant fou, en clin d’œil à ses nombreuses contributions au cinéma d’horreur, notamment chez Roger Corman. Les amateurs de polars reconnaîtront en Flic ou zombie un démarquage malin d’un petit film noir très prisés par les cinéphiles américains : Mort à l’arrivée (D. O. A., 1950) de Rudolph Maté, où un homme, victime d’un empoisonnement à l’effet inexorable, n’avait que vingt-quatre heures pour démasquer ses assassins. Dans Flic ou zombie, un policier transformé en zombie n’a lui aussi que quelques heures pour trouver les responsables de sa triste condition. Le compte à rebours ne concerne plus sa propre mort, déjà effective, mais l’état de décomposition accéléré de son corps. Le film marque le début de la dégringolade de la carrière de Treat Williams. Celle de son comparse Joe Piscopo n’a jamais décollé.

Catégories : Actualités

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *