Dans le cadre de sa programmation spéciale Festival international du film d’animation d’Annecy, ARTE diffuse La Planète sauvage (1973) de René Laloux lundi 12 juin à 22h35, en version restaurée. Il sera également disponible en télévision de rattrapage pendant sept jours sur ARTE+7.
La Planète sauvage vient d’être réédité en blu-ray par ARTE éditions, avec un livret de douze pages « René Laloux l’extraterrestre ».
Autant de bonnes raisons de revoir un film extraordinaire.
La Planète sauvage est l’un des premiers longs métrages d’animation français, et aussi l’un des premiers à ne pas s’adresser exclusivement au jeune public. Il est né de la rencontre entre le réalisateur René Laloux et le talentueux touche-à-tout Roland Topor. Les deux hommes ont librement adapté le roman de science-fiction de Stefan Wul (pseudonyme de Pierre Pairault), Oms en série publié en 1957. Topor est également l’auteur des dessins et de l’univers visuel du film, mis en scène par Laloux. La Planète sauvage emploie la technique du papier découpé. Les dessins sont réalisés au crayon dans des teintes pastel, ce qui tranche avec l’esthétique traditionnelle. Le film fut coproduit avec la Tchécoslovaquie, pays qui possédait alors de solides compétences dans le domaine de l’animation, et tourné dans les studios de Jiří Trnka à Prague. Topor, membre du mouvement Panique, est un héritier du surréalisme littéraire et pictural. Son univers poétique est volontiers cruel et iconoclaste. Film de science-fiction à l’imaginaire foisonnant, au bestiaire et à la flore d’une inquiétante beauté, La Planète sauvage est avant tout une allégorie politique sur les thèmes de l’esclavage et de la révolte, la civilisation et la barbarie, une fable où se croisent Swift, Spartacus et les pogroms d’Europe centrale. Les différences scalaires entre les gigantesques Draags et les Oms réduits à la taille d’insectes engendrent des visions cauchemardesques et psychédéliques qui font de La Planète sauvage un grand film pop. Les images fascinantes de La Planète sauvage ont traversé les décennies, accompagnées par la musique électronique de Alain Goraguer, devenue aussi célèbre que le film. La Planète sauvage obtint le prix spécial du jury du Festival de Cannes, l’année où la France était représentée par deux autres films à l’audace et à l’ambition hors du commun, La Maman et la Putain de Jean Eustache et La Grande Bouffe de Marco Ferreri.
René Laloux ne réalisera que trois longs métrages d’animation, appartenant tous au genre de la science-fiction, avec des collaborateurs d’exception. Après La Planète sauvage il y aura Les Maîtres du temps (1981) toujours d’après Wul, dessiné par Moebius et dialogué par Jean-Patrick Manchette, puis Gandahar (1988) d’après le roman de Jean-Pierre Andrevon, sur des dessins de Philippe Caza, dont l’ensemble de la production eut lieu en Corée du Nord. Deux films à redécouvrir.
Laisser un commentaire