Olivier Père

Locarno 2012 Day -3 : Fenêtre sur cour de Alfred Hitchcock

Fenêtre sur cour

Fenêtre sur cour

Cette année Hollywood célèbre un double anniversaire : celui du centenaire de deux de ses plus grands studios, Universal et Paramount.

A cette occasion, Universal a restauré numériquement quelques titres emblématiques de son riche catalogue, parmi lesquels Frankenstein de James Whale, Du silence et des ombres de Robert Mulligan (voir notre texte http://olivierpere.wordpress.com/2012/06/17/robert-mulligan-un-cineaste-trop-discret/), Charade de Stanley Donen, E.T. l’extra-terrestre et Les Dents de la mer de Steven Spielberg (voir notre texte http://olivierpere.wordpress.com/2012/05/23/cannes-2012-day-8-les-dents-de-la-mer-de-steven-spielberg-cannes-classics/), Fenêtre sur cour et Les Oiseaux d’Alfred Hitchcock. Nous avons choisi Fenêtre sur cour, qui fut distribué à l’époque par Paramount, histoire de faire un clin d’œil à la compagnie rivale et de souhaiter aux deux majors un bon anniversaire.

Fenêtre sur cour (Rear Window, 1954) d’Alfred Hitchcock avec James Stewart et Grace Kelly et l’un des films les plus célèbres, les plus géniaux et les plus populaire du grand cinéaste anglais et de sa période hollywoodienne.

Un photographe immobilisé dans son appartement de Greenwich Village, la jambe fracturée après un accident, passe ses journées à observer au téléobjectif les habitants de l’immeuble d’en face. Le comportement d’un de ses voisins éveille ses soupçons et il a bientôt la certitude d’avoir été témoin d’un assassinat.

Fenêtre sur cour marque l’aboutissement des recherches d’Hitchcock sur le huis clos, « la concentration théâtrale », après La Corde (Rope, 1948) tourné en plan-séquence dans un décor unique et Le crime était presque parfait (Dial M for Murder, 1954), dans lequel le procédé 3D (on parlait encore à l’époque de « relief ») était le moyen paradoxal d’exacerber la dimension théâtrale de son film avec un jeu permanent sur la profondeur de champ, amplifiée dans le dessein de recréer l’espace scénique des planches. Ici l’action est concentrée dans l’espace autarcique d’une cour d’immeuble vu d’un petit appartement, le tout reconstitué en studio avec un soin maniaque. Le film est célèbre parce qu’il explicite le voyeurisme ontologique du spectacle cinématographique. Dans Fenêtre sur cour, sans doute le plus parfait des films à suspense du cinéaste, une perversion cache une névrose. La mauvaise pulsion du personnage interprété par James Stewart est motivée par son désœuvrement, son impuissance temporaire, mais constitue aussi un dérivatif à l’angoisse du mariage (sa fiancée Grace Kelly veut lui mettre la corde au cou). Il n’est pas innocent que le spectacle secret offert par les voisins propose diverses déclinaisons, grotesques, pathétiques, aliénantes de la conjugalité, et que le meurtrier a tué son épouse. Un chef-d’œuvre à revoir en couple ou une jambe dans le plâtre, un huis clos magistral sur le cinéma et la place du spectateur qui prendra une nouvelle dimension spectaculaire projeté dans l’espace grandiose de la Piazza Grande, dans une restauration numérique en 2K flambant neuve, en vue de la sortie prochaine d’un blu-ray.

James Stewart, Grace Kelly, and Alfred Hitchcock on the set of REAR WINDOW, 1954

James Stewart, Grace Kelly, and Alfred Hitchcock on the set of Rear Window (1954)

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