Monsieur Lazhar est le nouveau phénomène du cinéma canadien, en lice pour l’Oscar du meilleur film étranger (résultat des courses le 26 février), lauréat d’une multitude de prix dans les festivals du monde entier depuis sa projection triomphale, en première mondiale, sur la Piazza Grande lors du 64ème Festival del film Locarno. Le film avait comblé d’émotion des spectateurs de Locarno, remportant le prix du public et le Variety Award. Depuis, le succès de Monsieur Lazhar ne s’est jamais démenti. Sorti dans de nombreux pays qui lui ont tous réservé un accueil chaleureux, le film est distribué en Suisse avant la France, une fois n’est pas coutume. Les spectateurs peuvent en effet voir Monsieur Lazhar dans les salles romandes depuis le 8 février, quant à la Suisse allemande ce sera pour le 23 février. Le distributeur suisse du film est Agora. La sortie française est prévue pour le second semestre 2012 (par UGC distribution), sauf très bonne surprise aux Oscars…
Monsieur Lazhar du cinéaste québécois Philippe Falardeau (produit par Luc Déry, auquel on doit aussi Incendies de Denis Villeneuve, un autre grand succès international du cinéma canadien) est l’adaptation d’une pièce de théâtre d’Évelyne de la Chenelière, unanimement saluée par la critique et le public. Bachir Lazhar est le nom d’un drôle de personnage, celui d’un professeur suppléant qui débarque dans une école primaire dans des circonstances tragiques. Une enseignante vient d’être retrouvée pendue dans sa salle de classe, pendant la recréation. Deux jeunes enfants ont eu le temps d’apercevoir le corps sans vie de leur maîtresse. Bachir Lazhar (formidable Fellag), monstre de gentillesse et de poésie, doit faire face au traumatisme des élèves, et réussir à se faire accepter par tout le monde. Il y parvient vite car son désir d’intégration est grand, comme son amour pour son métier et les enfants. Mais Bachir Lazhar cache un secret. Menteur, imposteur ? La réalité est plus complexe. Bachir Lazhar est un immigré algérien, sans papier, sans famille, et ce poste d’enseignant représente sa seule chance de demeurer au Canada et de s’intégrer dans la société. Monsieur Lazhar aborde avec pudeur deux thèmes sensibles : le deuil et l’immigration. Le film évite les écueils de l’œuvre à thèse car il ne quitte jamais le domaine de l’intime, grâce au destin singulier d’un homme à la personnalité hors du commun. Monsieur Lazhar est également remarquable par la manière dont il évoque l’enfance, à travers les réactions d’un garçon et d’une fille choqués par l’irruption brutale de la mort. Rarement depuis Truffaut un metteur en scène n’avait aussi bien compris et mis en scène des jeunes interprètes. Philippe Falardeau avait déjà fait preuve dans ses trois précédents films de beaucoup d’invention et de fantaisie (notamment Congorama que j’avais présenté à la Quinzaine des Réalisateurs en 2006.) Il réalise avec Monsieur Lazhar son long métrage le plus accompli, merveille d’intelligence et de sensibilité.
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