Olivier Père

L’Impossible Monsieur Bébé de Howard Hawks

Action Cinémas/Théâtre du Temple réédite demain au cinéma dans une version restaurée un chef-d’œuvre absolu de la comédie hollywoodienne, L’Impossible Monsieur Bébé (Bringing Up Baby, 1938). Hollywoodienne mais avant tout hawksienne. On sait que Hawks a réalisé des films géniaux dans presque tous les genres du cinéma américain, mais il s’est surpassé avec ce film d’une intelligence et d’un humour vertigineux, qui représente la quintessence de son art.

Katharine Hepburn

Katharine Hepburn

Un paléontologue distrait (Cary Grant, qui s’inspire pour ce rôle de Harold Lloyd, lunettes rondes comprises), fiancé à sa secrétaire, fait par hasard la connaissance d’une jeune héritière excentrique (Katharine Hepburn). Celle-ci, avec la complicité de son léopard domestique, lui fait des avances et plonge le timide savant dans la plus profonde confusion. L’animal dérobe un précieux os de dinosaure et l’enterre dans un endroit inconnu, ce qui achève de mettre le scientifique hors de lui. Un homme maladroit hésitant entre deux femmes et à la recherche de son os (« bone » en anglais renvoie bien sûr au membre phallique) : il n’en faut pas plus à Howard Hawks pour réaliser une comédie absolument frénétique qui pousse très loin le délire, verbal et visuel, aidé par la fantaisie, la souplesse et le débit hallucinants de ses deux vedettes. Hawks s’amuse à inverser les comportements de ses personnages masculins et féminins. Une constante dans son œuvre. Quelques-uns des gags les plus drôles de l’histoire du cinéma, comme celui de la robe de Katharine Hepburn déchiré par inadvertance par Grant dans un cocktail sans qu’elle ne s’en aperçoive. Pal mal de choses à dire sur le fétichisme vestimentaire chez Hawks… Comme l’a fait remarquer Luc Moullet, auteur d’un ouvrage de référence sur les grands acteurs du cinéma américain classique (« La Politique des acteurs », éditions de l’Etoile), Cary Grant, travesti dans une robe de chambre, effectue un des premiers – et subtils – « coming out » à l’écran, en tournant en dérision sa propre sexualité avant même que le grand public ne soupçonne son ambivalence. Les deux hommes iront beaucoup plus loin onze ans plus tard dans Allez couchez ailleurs (I Was a Male War Bride), où Grant se déguise en femme.

 

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