Mes petites amoureuses

Dans la campagne girondine, Daniel connaît une enfance heureuse, entre premiers émois prépubères et vie au grand air avec sa bande de copains. Élevé par sa grand-mère, il doit pourtant faire ses valises lorsque sa mère, installée à Narbonne avec son nouveau compagnon, décide de le reprendre avec elle. Le jeune garçon déchante vite quand il découvre ce que cette dernière lui avait jusqu’ici caché : il ne pourra pas poursuivre sa scolarité car le couple n’a pas les moyens de financer son entrée au collège. Désormais apprenti chez un mécanicien, Daniel se lie d’amitié avec des garçons plus âgés, qui n’ont qu’une seule obsession : les filles, et les meilleures stratégies pour draguer.

Attractions et champs magnétiques  
Un an après le succès du très dialogué La maman et la putain, Jean Eustache prend son public à revers. À l’image de son jeune héros, plutôt taiseux et réfléchi, Mes petites amoureuses a la parole économe, voire minimale. Du temps et de l’espace sont laissés aux silences qui en disent long et aux personnages qui restent interdits – face à l'autoritarisme et l’ingratitude des adultes mais, aussi et surtout, devant l’attraction exercée par les femmes. Car ce film d’apprentissage traite du désir affleurant et des pulsions sous-tendues chez les hommes, qui, commandés par leur frustration, en perdent tout scrupule. Daniel entre sur la pointe des pieds dans un monde où tout lui paraît sexualisé, dès lors qu’une femme ou une jeune fille surgissent dans son champ de vision. Évitant toute posture morale, Jean Eustache fait le récit autobiographique plein de finesse de ses premiers tourments érotiques tout en portant un regard naturaliste sur la vie provinciale dans le sud de la France, d’où il est originaire. À noter les brèves apparitions de Maurice Pialat en barbon réac et du réalisateur lui-même, assis seul et désœuvré sur un banc dans un parc, alors que les couples défilent et s’embrassent devant lui.