Dalva

Un soir, lors d’une descente de police, Dalva est arrachée à la maison où elle habite seule avec son père. Malgré ses 12 ans, elle est vêtue, maquillée et apprêtée comme une femme : la fillette, séquestrée et déscolarisée, vivait depuis des années sous le joug de cet homme incestueux qui avait construit avec elle une relation conjugale. Aussitôt placée dans un foyer d’aide à l’enfance, Dalva bouillonne de colère et d’incompréhension : elle refuse d’être séparée de "Jacques", mis en détention, et de reconnaître son propre statut de victime. Aux côtés d’éducateurs à la bienveillance parfois maladroite et des adolescents cabossés dont elle partage le foyer – dont Samia, sa camarade de chambrée –, Dalva entame un long chemin pour s’extraire d'une emprise qu’elle prend encore pour de l’amour, et renouer avec l’enfance qui lui a été volée... 

Saut dans le vide 
On sent la filiation des frères Dardenne dans ce film franco-belge, premier long métrage d’Emmanuelle Nicot, fruit d’un minutieux travail d’enquête presque documentaire : en quête de réalisme social, sa réalisatrice et scénariste s’est plongée en immersion dans un foyer d’accueil d’urgence de Moselle, auprès d’enquêteurs de police et de professionnels de la justice. Elle parvient à traiter avec subtilité et délicatesse de l’inceste parental, si destructeur et pourtant si terriblement banal, et du vertigineux saut dans le vide que représente la sortie de cette forme insidieuse de domination : on suit une jeune héroïne impressionnante de résilience qui, pour se protéger, se réfugie d’abord dans le déni et l’identification à l’agresseur, avant de traverser une crise identitaire indispensable à sa reconstruction. Dans le rôle-titre, Zelda Samson, actrice débutante d’une intensité sidérante, est une révélation. Son visage magnétique, de tous les plans, paraît changer d’âge d’une mimique à l’autre, à l’instar de son personnage. Pour retrouver, à mesure de l’émancipation de Dalva, la fraîcheur effrontée qui sied à l’entrée dans l’adolescence.