Olivier Père

La Maison près du cimetière de Lucio Fulci

La Maison près du cimetière (Quella villa accanto al cimitero, 1981) revisite le thème cinématographique et littéraire de la maison hantée. Un couple et leur petit garçon viennent s’installer dans une vieille demeure de la région de Boston. Le mari est un scientifique qui entend poursuivre les recherches d’un collègue suicidé au sujet du docteur Freudstein, condamné à la fin du XIXème siècle pour des expériences médicales illégales. La cave de la maison, dont la porte a été scellée, dissimule un terrifiant secret. Cette intrigue permet à Fulci de mettre en scène des mises à mort horribles mais surtout de préciser ce qui faisait la particularité de ses précédents films fantastiques Frayeurs et L’Au-delà : la communication entre différents espace-temps, représentée ici par la relation entre le petit garçon et une fillette échappée de la mort et du passé, qui tente d’avertir l’enfant du danger qui les menacent lui et ses parents. D’abord à l’intérieur d’une photographie de la maison étrangement présente dans l’appartement new-yorkais de la famille avant leur déménagement, ensuite lors de rencontres secrètes dans les environs de la résidence. Entre sentiment de déjà-vu et prémonitions funèbres, le film de Fulci explicite aussi le devenir marionnette de personnages aux comportements irrationnels réduits à des manifestations d’angoisse, telle la baby-sitter (la fascinante Ania Pieroni) qui apparaît pour la première fois sous la forme d’un mannequin dans une vitrine, avec l’anticipation de son macabre destin. La complaisance des meurtres et les flots de sang ne font qu’accentuer la lancinante lenteur de l’ensemble du film, comme un cauchemar sans fin dont sont prisonniers à la fois les protagonistes et les spectateurs. La Maison près du cimetière s’achève par une citation de Henry James qui souligne la relation du film de Fulci avec Le Tour d’écrou et ses enfants en proie à la corruption d’adultes maléfiques : « Nul ne saura jamais si les enfants sont des monstres ou les monstres des enfants. »

Au-delà de ce grand guignol décadent, La Maison près du cimetière illustre la thématique de la superposition d’univers disjoints, du point de rencontre entre le cauchemar et la réalité, le passé et le présent, le monde des morts et celui des vivants. L’espace de quelques films, Fulci parvint à faire rimer magie et vomi, au point de devenir pour ses admirateurs non seulement un maître du macabre, mais aussi un esthète de la pourriture, enregistrant avec une cruauté malsaine et une lucidité ricaneuse la mort du cinéma italien de genre, étroitement liée à son propre déclin professionnel.

Le film de Lucio Fulci est édité en combo DVD Blu-ray par ESC, accompagné de nombreux suppléments audiovisuels et d’un livret.

 

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