Olivier Père

Faute d’amour de Andreï Zviaguintsev

Faute d’amour (Nelyubov) sort mercredi 20 septembre dans les salles françaises, distribué par Pyramide. Récompensé par le prix du jury, c’était l’un des meilleurs films de la sélection officielle du Festival de Cannes cette année. Faute d’amour confirme le talent exceptionnel de son auteur, Andreï Zviaguintsev.

Dans la Russie contemporaine, un couple au bord du divorce fait face à la disparition inexpliquée de son fils de douze ans. A travers l’histoire bouleversante d’un conflit familial, Andreï Zviaguintsev (Le Retour, Le Bannissement, Elena, Leviathan) pose son regard implacable sur la société russe et plus généralement sur notre ère postmoderne. Le cinéaste ne condamne pas tant ses personnages de parents murés dans leur haine, leur indifférence et leur égoïsme qu’il ne dresse un constat moral terrible sur un monde radicalement matérialiste, déshumanisé jusqu’à l’horreur. Dans cet environnement glaçant, un enfant de douze ans n’a plus sa place. Le secret de son incommensurable chagrin est partagé avec les spectateurs le temps de deux plans bouleversants, dans lesquels on le voit sangloter en cachette en entendant sa mère et son père se disputer avec violence. Ce n’est qu’en disparaissant que l’enfant va pouvoir enfin exister aux yeux de ses parents, contrariés par une absence qu’ils prennent d’abord pour une fugue sans importance. Mais cette disparition est chargée d’une signification bien plus forte qu’un sordide fait-divers. Elle devient acte de résistance. La fuite ou le suicide devient pour une âme pure la seule façon de refuser une vie sans amour, une société où seul un groupe de bénévoles spécialisés dans la recherche de personnes disparues semble capable de générosité et d’altruisme. Faute d’amour est un film admirable et terrible qui vient nous rappeler l’intelligence et l’absolue maîtrise de Zviaguintsev, dont la direction d’acteurs et la mise en scène sont impressionnantes. L’inspiration de Zviaguintsev n’est pas confinée au domaine de l’étude psychologique. Il se révèle aussi grand cinéaste formaliste des espaces intimes et des paysages urbains, capable d’apporter une dimension picturale, organique ou mentale à des décors d’appartements ou de ruines.

Faute d'amour de Andreï Zvianguintsev

Faute d’amour de Andreï Zvianguintsev

Catégories : Actualités · Coproductions

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