ARTE diffuse ce soir à 20h50 Little Odessa (1994) de James Gray suivi à 22h20 de « Il était une fois… Little Odessa » documentaire inédit de David Thompson dans la collection « Un film et son époque. »
Dès son premier long métrage le jeune cinéaste témoigne d’une maîtrise et d’une ambition inhabituelles dans le cinéma indépendant américain de l’époque. Dans Little Odessa James Gray emprunte les codes du film noir pour raconter une histoire très autobiographique centrée sur ses souvenirs d’adolescent new yorkais et sa relation avec les membres de sa propre famille. Le cinéaste s’appuie sur un sérieux travail documentaire et une immersion dans la vraie mafia russe du quartier de Brighton Beach au sud de Brooklyn, peuplée par une communauté juive venue d’Europe de l’Est, théâtre de l’action de son film, pour mieux s’en abstraire et aboutir à une véritable tragédie intimiste, une œuvre au noir aux éclairages dignes du Caravage. Les relations entre frères au cœur de Little Odessa se retrouveront au centre des deux films suivants de Gray, The Yards et La nuit nous appartient. Tim Roth interprète un sombre tueur à gages, personnage vampirique qui charrie la mort, exécutant ses contrats sans état d’âme, mais semant aussi la désolation autour de lui, y compris chez les seuls êtres qu’il aime. Film sur la contamination du Mal, qui prend ici la forme de la violence mafieuse mais aussi de la maladie (la lente et douloureuse agonie de la mère atteinte d’une tumeur au cerveau) Little Odessa impressionne par son pessimisme radical, la force de sa mise en scène. Le documentaire qui suit la diffusion de Little Odessa, excellent, revient en détails sur la conception, le tournage et la réception de ce titre important du cinéma américain contemporain, marquant l’apparition d’un cinéaste très talentueux, mais surtout d’une grande intégrité morale et artistique, avec entre autres des témoignages de Gray, Tim Roth et Vanessa Redgrave.
Un univers hiémal, avec au centre, Brooklyn filmé comme rarement.
Un film construit comme un Requiem, qui s’éteint dans un final glaçant. Joshua, derrière son pare brise, dans son cercueil de verre, sera condamné à cohabiter avec ses fantômes.
Trente ans après, le film possède toujours, et peut-être plus encore, cette beauté classique, qui lui donne son caractère indémodable.
Magistrale direction d’acteurs.
film extrêmement maîtrisé pour un premier long métrage, et qui reste un des meilleurs de son auteur.