En janvier 1996, ARTE et ses partenaires ARTE France, l’ARD et la ZDF décidaient de réunir leurs forces et signaient un accord de coproduction cinématographique. Créé à l’initiative de Heinz Ungureit de la ZDF, cet accord a pour objectif majeur d’apporter chaque année une contribution plus substantielle à six films de grands réalisateurs. Pour la diffusion, il permet de renforcer l’exposition du cinéma européen à travers ses grands auteurs. La sélection éditoriale est orientée par la dimension internationale du projet, de la production ou de l’auteur et exclut les premiers films. Bien qu’appelé communément « Grand Accord Franco-Allemand » par la profession, il n’a pas vocation à se concentrer sur des coproductions de films français ou allemands, celles-ci entrant dans la mission de coproduction nationale de chaque pôle. Son intention est, dès l’origine, de promouvoir les coproductions européennes qui encouragent ARTE dans sa volonté de contribuer à la vitalité d’un cinéma original et courageux, où la liberté de ton le dispute à l’audace de la forme.
Siègent actuellement au comité de sélection Andreas Schreitmüller (ARTE G.E.I.E.), Gebhard Henke (WDR), Meinholf Zurhorst (ZDF) et moi-même. Ce comité se réunit cinq fois par an pour décider de la coproduction en commun de six films. L’unanimité est requise. Les films sont proposés par les deux pays (trois chacun.) Les six films du Grand Accord entrent dans le quota de la vingtaine de films coproduits annuellement par ARTE France Cinéma.
Les trois films d’initiative française sont préalablement sélectionnés par le comité de sélection d’ARTE France Cinéma. Les trois films d’initiative allemande ne sont pas soumis à la validation du comité de Sélection d’ARTE France Cinéma. Dans tous les cas, le film qui bénéficie du Grand Accord Européen doit avoir un producteur français et un producteur allemand, ainsi qu’un distributeur dans chacun des deux pays.
Depuis un an les films d’initiative française ayant obtenu le Grand Accord sont Clouds of Sils Maria d’Olivier Assayas, 3 Cœurs de Benoit Jacquot, Les Mille et Une Nuits de Miguel Gomes et Mia madre de Nanni Moretti, actuellement en postproduction (pour les deux premiers) ou en tournage (pour les deux autres), déjà présentés ici et dont les sorties en salles sont prévues courant 2014 et 2015.
Les films d’initiative allemande sont les nouveaux longs métrages de Christoph Hochhäusler, Andreas Dresen, Werner Herzog auxquels on ajoutera Diplomatie de Volker Schlöndorff, long métrage en langue française interprété par André Dussollier et Niels Arestrup adapté de la pièce de Cyril Gély, produit par Film Oblige, coproduit par Gaumont et Blueprint Film, qui vient de sortir en salles en France mercredi, avec une réponse enthousiaste des spectateurs.
Lichtjahre (« les années lumière »), quatrième long métrage de Christoph Hochhäusler (Le Bois lacté, L’Imposteur, Sous toi, la ville) jeune auteur talentueux de la nouvelle école berlinoise est en cours de mixage. Produit par Heimatfilm en Allemagne, avec la participation de MACT Productions en France, ce film très attendu pourrait marquer un tournant dans la filmographie de Hochhäusler puisqu’il s’agit d’une histoire d’espionnage dans les eaux troubles du journalisme et de la politique, toujours aussi ambitieux sur le plan formel et narratif mais répondant davantage aux codes du thriller que les précédents drames du cinéaste.
Né en 1963 en RDA, Andreas Dresen est un cinéaste très prolifique, tant pour le grand que le petit écran, qui nous avait beaucoup impressionné avec deux films découverts au Festival de Cannes dans la section Un Certain Regard : 7ième Ciel (Wolke 9) en 2008 sur une étonnante passion adultérine entre deux personnes âgées et surtout Pour lui (Halt auf freier Strecke) en 2011 qui décrivait avec un réalisme saisissant et une absence totale d’apitoiement la longe agonie d’un homme atteint d’une tumeur au cerveau, entouré de sa famille. Son nouveau long métrage en postproduction, Als wir traümten (« quand nous rêvions »), adapté d’un roman à succès de Clemens Meyer publié en 2006 propose la chronique d’une bande de jeunes amis, entre rêves de réussite, délinquance et rébellion, peu de temps avant la chute du mur de Berlin, en République Démocratique Allemande. Cet « il était une fois en Allemagne de l’Est » est produit par Rommel Film et coproduit par Cinéma Defacto.
« Last but not least », l’hyperactif Werner Herzog (photo en tête de texte) prépare pour un tournage cette année Vernon God Little, son prochain long métrage tourné aux Etats-Unis, d’après le roman éponyme de DBC Pierre publié en 2003 et adapté pour le cinéma par le scénariste anglais Andrew Birkin. Relatant les conséquences d’une fusillade mortelle dans un campus d’une petite ville frontière du Texas, Vernon God Little est une comédie très noire et une satire des médias sur l’obsession d’un pays pour la violence et la célébrité, qui devrait permettre au cinéaste allemand de poursuivre sa passionnante étude critique des Etats-Unis contemporain entreprise dans une série de fictions et de documentaires (les derniers en date étant le remarquable Into the Abyss et la série télévisée On Death Row, tous deux consacrés aux détenus condamnés à mort dans les prisons du Texas), tout en entretenant sa veine excentrique récemment illustrée (en 2009) par une nouvelle version du Bad Lieutenant de Ferrara avec Nicolas Cage tournée à la Nouvelle Orléans, et My Son, My Son, What Have Ye Done drame criminel sur un tueur mystique interprété par Michael Shannon. Vernon God Little est produit par X-Filme Creative Pool en Allemagne, avec Haut et Court comme coproducteur français.
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