Dans le cadre de sa journée consacrée à David Bowie, ARTE diffuse ce soir à 20h45 l’un des derniers grands rôles du « Thin White Duke », alias « Ziggy Stardust », encore auréolé de son statut de star et de symbole sexuel glam rock et qui avait déjà fait monter la température dans ses précédentes incursions au cinéma, Just au Gigolo de David Hemmings, et surtout L’homme qui venait d’ailleurs de Nicolas Roeg et Furyo de Nagisa Oshima.
Les Prédateurs (The Hunger, 1983) c’est une madeleine de Proust pour de nombreux adolescents qui ont découvert le cinéma dans les années 80, et quelques autres trop jeunes à l’époque mais qui délirent aujourd’hui sur cette décennie vulgaire, excessive et flamboyante. Détesté par la critique et bide commercial malgré une sélection officielle au Festival de Cannes (hors compétition) le film gagna rapidement un statut de « film culte » bien mérité d’abord auprès des amateurs de rock, puis d’une certaine frange déviante de la cinéphilie (dont nous faisons partie.) Ce film fantastique ultra esthétisant, énième variation autour du mythe de la comtesse Bathory, évoque l’univers éthéré de vampires intemporels, réfractaires à la laideur du monde moderne. Sa séquence générique se déroule dans une boîte de nuit au son de « Bela Lugosi’s Dead » du groupe new wave Bauhaus, ce qui en fit une référence pour les branchés de l’époque et un film emblématique pour le mouvement « goth » (vampirisme + rock + histoire d’amour éternelle.) Erotisme chic de papier glacé, imagerie publicitaire, décadentisme british, Les Prédateurs offrait le flanc pour se faire battre, mais il transcende à la revoyure tous ses effets visuels tapageurs grâce à la sensualité et au pouvoir de fascination de ses interprètes (Catherine Deneuve sublime, David Bowie, Susan Sarandon) et de son romantisme dark, pour qui aime les femmes vampires bisexuelles calfeutrées dans des luxueux immeubles new yorkais et avoue un plaisir coupable devant Les Lèvres rouges et Spermula. Nous sommes finalement plus proches d’Helmut Newton et Nicolas Roeg première période que d’Alan Parker, et l’on peut imaginer que Tony Scott n’aurait jamais accepté de tourner Top Gun trois ans après Les Prédateurs si son premier film avait été un succès…
Quoi qu’il en soit, on est prêt à échanger ces prédateurs de la nuit et quelques réussites du regretté Tony Scott contre l’œuvre complète et le pompiérisme de son frère Sir Ridley (mis à part Alien, le huitième passager.)
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