« Giallo » de série comme Luciano Martino en produisait, et Ernesto Gastaldi en écrivait à la chaîne au début des années 70, Les Rendez-vous de Satan (Perché qualle strane gocce di sangue sul corpo di Jennifer?, 1972) compense son manque d’originalité par un savoir-faire et des ingrédients – frissons, érotisme, humour noir – que l’amateur de cinéma bis italien éprouve du plaisir à retrouver, plutôt bien dosés. Le film débute par un double meurtre commis dans le même immeuble bourgeois. Deux jeunes femmes aux mœurs légères sont assassinées à quelques heures d’intervalle, l’une dans l’ascenseur, l’autre dans sa baignoire. Le propriétaire des lieux invite deux mannequins, Jennifer et Marilyn à occuper l’appartement vacant de la seconde victime. Bientôt Jennifer est harcelée par des appels téléphoniques qui semblent provenir du tueur en série. Commence alors la valse des suspects, puisque chaque protagoniste parvient successivement à éveiller les soupçons du spectateur, par un comportement étrange ou des motivations plus profonde. La partie « whodunit » constitue l’aspect routinier du film, et de la plupart des gialli de cette époque. Mais les scènes de meurtres sont plutôt réussies, conçues comme des hommages aux deux maîtres du giallo, Mario Bava et Dario Argento. La silhouette du tueur au visage voilé et aux gants noirs est une référence directe à Six femmes pour l’assassin. Carmineo, pour son unique incursion dans le « giallo », soigne l’ambiance de son film et parvient à tirer profit de l’architecture moderne de Gênes, avec ses espaces urbains banals d’où peut surgir la mort. Les Rendez-vous de Satan n’échapperait pourtant pas à la banalité sans la sublime présence d’Edwige Fenech, égérie des frères Martino, devenue en une série de films une héroïne du « giallo ». Toujours parfaite en victime persécutée par la folie et la concupiscence des hommes, la belle Edwige se montre peu avare de ses charmes, et dévoile un corps de rêve. Celle qui symbolisa dans la comédie sexy transalpine une féminité agressive et sûre de son pouvoir de séduction a souvent interprété dans les « gialli » des jeunes femmes fragiles et névrosées, souffrant de frigidité. Dans le film de Carmineo, des flash-backs révèlent une expérience traumatique un ex-amant partouzeur et drogué, qui la forçait à participer à des orgies où elle était offerte aux membres de sa secte. Ces séquences constituent des rappels d’un film précédent de la Fenech, Toutes les couleurs du vice / L’Alliance invisible de Sergio Martino, tourné quelques mois plus tôt : elle y était tourmentée par des adorateurs de Satan. Ces brefs passages psychédéliques expliquent sans doute le titre absurde dont fut affublé le film lors de sa tardive sortie française, sept ans après sa réalisation. Il n’y a aucune trace de Satan, ou de rendez-vous avec le diable, dans ce film où le sang et le corps de Jennifer – Edwige occupent en revanche une place importante.
Les Rendez-vous de Satan est disponible dans une édition collector DVD plus blu-ray, chez Le Chat qui fume, spécialisé dans le cinéma d’exploitation européen et américain.
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