Brexit : les archives du journal subjectif
Comment le Royaume sort de l’Union

Brexit : les archives du journal subjectif
Comment le Royaume sort de l’Union
52% dans ta face
C’est le matin. De base déjà, c’est pas la joie. Ton radio-réveil s’allume, il est 8h et tu entends que le Brexit a gagné. Putain, c’est pas vrai. T’enfonces la tête dans ton oreiller. Hier, t’avais eu trois notifications à 23h30 pour t’annoncer que le « Remain » était en tête, tu t’es endormie sereinement en te disant “les crétins, ils m’ont fait faire tout ce voyage pour rien, finalement ils sont raisonnables”. Oh putain, c’est pas vrai. Il est 8h et t’as pas fini de bader.
Ce matin, c’est comme si Mr Bean redébarquait des années 90… visiblement très en forme.
Chacun a un avis. Tout le monde, je te dis. Ton collègue à la machine à café, ta voisine de table au déjeuner – « j’en reviens pas, jamais j’aurais pensé que ça marcherait” – des mecs à la sandwicherie de la gare – “il manquerait plus qu’ils gagnent l’euro” – tes vieux potes communistes aussi – “je sais pas ce que j’aurais répondu finalement, moi aussi, ouais après tout c’est vrai, vu le libéralisme de l’Union européenne” – et ta mère évidemment, qui râle de façon très constructive, concluant un bon vieux “oh puis ils n’ont qu’à se casser, ces imbéciles d’Anglais, on veut pas d’eux”. Tout de suite, ça élève le débat.
Ce matin du 24 juin a des allures de crise politique et financière pour le Royaume. Toute la journée, les radios autour de toi hurlent face à l’effondrement des bourses. L’élite européenne semble lever son index à l’adresse des Grands-Bretons : “Le Brexit fait paniquer les marchés, on vous l’avait dit”.
Alex, mon amie d’Oxford, est sous le choc. « J’arrive pas à y croire. C’est honteux ce qu’on a fait ». Elle est mignonne, elle s’inclut dans le désastre collectif alors qu’elle aura appelé au « Remain » autour d’elle pendant des semaines.
Dans sa famille, son frère europhobe joue la provoc’ : « Il m’a envoyé un texto ce matin disant : ‘Happy Independence Day’. Je ne lui ai pas répondu depuis, vaut mieux qu’on se calme tous les deux ». Paye l’ambiance autour du repas de famille, ces prochains dimanches.
Si certains accrocheraient bien la tête de David Cameron au centre de leur jeu de fléchettes, Alex ne lui en veut pas. « Personne n’aurait pu comprendre la profondeur des divisions dans ce pays, lui y compris et ce n’est pas seulement sa faute à lui. Honnêtement j’ai éprouvé un moment fort de tendresse pour Cameron quand je l’ai vu sortir du 10, Downing Street vendredi matin. Il tenait le main de sa femme – et j’ai pensé tout d’un coup : cela veut dire qu’il va démissionner. Et j’ai eu peur ; je n’ai pas voté pour lui, j’ai trouvé sa politique injuste, mais j’ai réalisé jeudi soir que les alternatives sont pires, vraiment pires. »

Brexit Bicycle
ARTE Reportage a traversé la Manche pour raconter le Brexit. Aliénor a raconté au jour le jour les coulisses de ce road-trip so british et nous livre des scènes de vie d’une Angleterre divisée. A découvrir ici.
Chronologie du 24 juin : départ dans le rouge
4h50. Libéréééé délivréééé – Nigel Farage « ose à présent rêver que pointe l’aube de l’indépendance du Royaume-Uni ». Il est pourtant bien réveillé.
5h. Tête de vainqueur. Nigel Farage fait cette tête. Le Daily Mail en fait sa Une. « Nous avons récupéré notre pays, merci à tous ».
6h. Équation du matin, chagrin. La BBC et Sky News estiment qu’avec neuf cent mille voix d’avance, le Brexit est officiel.
7h. Montagnes russes – La panique gagne doucement les marchés financiers. On note la plus grosse chute de la livre sterling depuis les années 1970.
7h30. Le référendum, c’est tendance – En Irlande (à 55% pro-« Remain »), Le parti nationaliste Sinn Féin appelle à un référendum pour une Irlande unifiée.
8h. Chiffres officiels – Les derniers résultats donnent le Brexit gagnant à 51,9 % contre 48,1 % pour le maintien. 17,4 millions de personnes se sont prononcés pour le « Leave » et 16,1 millions pour le « Remain ». La participation est estimée à 72%.
8h30. Les blasés de l’histoire – Parmi les europhiles : l’Ecosse (62 % pour le maintien), l’Irlande du Nord (56 % pour) et Gibraltar (95 %).
10h15. Epic fail de la méthode Coué – Les bookmakers anglais avaient massivement misé sur le maintien du Royaume-Uni dans l’UE : plus de cent millions de livres Sterling ont été joués, ce qui en fait l’enjeu de pari le plus important de l’année en dehors de l’Euro.
11h. Casse-tête british – Londres a deux ans pour renégocier l’intégralité des accords de libre-échange qui existent actuellement entre l’Union européenne et le reste du monde. Soit cinquante-trois accords !
11h30. A ciao bonsoir – Devant Downing Street, David Cameron annonce qu’il démissionnera de son poste dans les trois mois.
12h. Mutti rentre dans le game – Angela Merkel intervient en public et se veut rassurante : “L’Union européenne est assez forte pour trouver des réponses à un jour comme celui-ci”.
12h15. Martin dégaine – Attendre trois mois, comme le propose David Cameron – ça ne convient pas à tout le monde… Martin Schulz, le président du Parlement européen, souhaite « des négociations rapides », et appelle à accélérer le processus de sortie.
13h. Nouveau trio gagnant – Angela a invité François Hollane à Berlin le lundi suivant. Petit plus : elle a même convié à ce tête-à-tête au sommet l’Italien Mateo Renzi !
14h15. Tomates pourries – Boris Johnson sort de chez lui et se fait huer comme jamais.
17h. Londres veut faire sécession – Simple boutade au départ, une pétition pour l’indépendance de Londres et son adhésion à l’UE recueille quarante-quatre mille signatures et demande à Sadiq Khan à devenir président plutôt que maire !
23 h45. Bulletin rouge – L’agence Moody’s abaisse la note du Royaume-Uni de stable à négative.










Après avoir voyagé dans l’Angleterre conservatrice en vélo, je suis revenue en France avec un arrière-goût amer en bouche. J’ai eu le temps de rencontrer pléthore d’Anglais aigris, abîmés par les changements sociaux hérités du thatchérisme, mais aussi violentés par la globalisation. Le refrain naturel du “c’était mieux avant” toque à leur porte tous les matins, avec la livraison du Daily Mail. Ils rêvent d’indépendance, disent de leur pays qu’il est bien assez fort tout seul, d’ailleurs, c’était le cas autrefois, au temps de l’Empire, alors pourquoi plus maintenant ? Leur passé est fantasmé. Ils ne voient pas ce que l’Europe apporte, ou a apporté. C’est une question de point de vue, ils ne lisent pas non plus d’articles contradictoires. Les plus âgés ont l’impression que l’Allemagne dicte les lois européennes, ce qui leur rappelle une époque bien sombre, quand ils étaient enfants.
Pour comprendre qui a voté quoi, ma pote Alex me sort un graphique, le matin même du vote.
Rapidement, on y lit :
- Les jeunes de 18 à 24 ans préfèrent le « Remain » à 73%.
- Les vieux de plus de 65 ans ont voté à 60% pour le « Leave ».
- Les riches (AB = classe moyenne supérieure) ont choisi le « Remain » à 57%.
- Les plus modestes (C2 + DE = classe ouvrière et chômeurs) ont écounduit l’Europe à 64%.
“C’est très clair, c’est les gens âgés et les gens pauvres qu’on doit remercier », résume Alex. Les campagnes aussi, plus largement, comme le synthétise cette carte.
Sur le chemin de ces villes sans prestige, nous avons régulièrement croisé, en rouge et blanc, des écriteaux « Vote leave », scotchés aux fenêtres à guillotine, à l’arrière des pare-brises ou sur de vieux panneaux publicitaires mal nettoyés le long des voies rapides. Je me suis rassurée, pensant qu’il fallait compter sur le vote des Irlandais, des Écossais, et que toute l’Angleterre ne pouvait être comme je l’avais croisée sur une durée – de toute façon – trop courte. Pourtant le vent tournait clairement à la défaveur de l’UE. La campagne pro-Brexit a été indécente, a remué la merde, mélangé les camps, aggravé les divisions, et a conduit à une lutte individuelle pour le pouvoir et non pour les intérêts globaux du pays.

Le vote des Britanniques

Résultat par circonscription
Top 5 des bêtises entendues sur l’UE pendant la campagne
L’UE produit des centaines de normes chaque année, et cherche à les harmoniser entre les 28-bientôt-27-pays. C’est le principe du marché unique, qui permet à un industriel de vendre le même produit dans toute l’UE. Et cela conduit à quelques incompréhensions du style « L’Union Européenne ne sert à rien, elle est là pour nous dicter la couleur de nos fraises ». Florilège…





Les fausses infos circulent. La faute à qui ? Les proeuropéens n’ont pas répondu aux europhobes. Tous les médias n’en ont peut-être pas assez parlé. Ou mal. Et si on parlait mal de l’Europe ? Et les citoyens européens s’en fichent. La direction que prend l’UE ne plaît pas aux Européens. Mais si les gens commençaient par aller voter pour l’UE qu’ils souhaitent ?! Certes, ce 23 juin, les Britanniques se sont déplacés en masse pour voter mais aux élections européennes de 2014 comme en 2009, le taux d’abstention était environ de 65%. L’électeur européen, c’est comme un serpent qui se mord la queue. Ou sa version 2.0 : le chat fou.
Moralité : on ne sait qui remercier pour ce Brexit. Deux jours après l’annonce, c’est la crise. La moitié du Royaume-Uni pleure d’avoir perdu son adhésion. Ceux qui ne sont pas allés voter l’ont dans l’os. Pendant ce temps-là, Boris Johnson est parti tranquilou faire du cricket pour le week-end Il est au top de sa motivation après des semaines de campagne.
Et ça inspire le web. D’ailleurs, si je vous dis “I’ll tell you what I want, what I really, really want”, vous me répondez… “So tell me what you want, what you really, really want” (et vous devriez cliquer ici).
La recette d’un Brexit réussi : 2 kg de bipolarité, 500g de snobisme, et une pincée de xénophobie
L’équation paraît simple. Royaume-Uni = Angleterre + Pays de Galles + Ecosse + Irlande du Nord. Jusqu’ici tout va bien. Quatre peuples, plus ou moins partants pour rejoindre en 1973 une union politique et économique alors appelée CEE. L’identité britannique est – à l’origine déjà – tout ce qu’il y a de plus complexe.
A ce pays multi-facettes s’est ajoutée une part d’immigration : environ 10% de la population est née dans un autre pays, un chiffre semblable aux pays européens voisins. Pourtant l’argument principal de la campagne pro-Brexit était la pression migratoire, exercée par l’UE sur le Royaume. Résumé par l’amalgame simplet “ils sont trop nombreux et nous piquent notre travail”, l’île s’est engouffrée dans un racisme latent. Le Brexit a remué la merde. A cela s’ajoutent les Brexiteurs, snobés par les élites, les rangeant systématiquement dans un sac de ploucs. Ce sentiment d’être mis de côté, jamais écouté, jamais compris, invisible dans les médias, décalé de la société : ils ont eu cette envie – que l’on peut comprendre – d’être à contre-courant. De dire non.
Résultat : le Royaume se retrouve scindé entre ses identités nationales, mais aussi entre ceux qui ont voté pour, ceux qui ont voté contre, ceux qui n’ont pas pu voter parce qu’ils ne sont que résidents britanniques, ceux qui sont natifs et trop fiers de l’être, ceux qui viennent de milieux modestes, ceux qui travaillent à la City, ceux qui sont loin des métropoles, ceux qui ont du travail, ceux qui ne sont pas assez formés pour en avoir un stable.
Côté politique, c’est pas mieux, ni le parti travailliste – menacé par une guerre des gangs à sa tête – ni le parti conservateur ne sortent gagnants du Brexit. Seul Ukip et Nigel Farage s’en sortent bien. Avec le tact qu’il faut. “Nous l’avons gagné sans se battre, sans qu’aucune balle ne soit tirée”, a fièrement proclamé Farage, une semaine après le meurtre de la députée travailliste pro-européenne Jo Cox. Jo, qui, depuis sa tombe, se retourne lentement pour ne pas voir ce que son pays subit :
Première conséquence indirecte : la hausse du nombre d’agressions envers les étrangers.
Un recensement se fait par l’intermédiaire des réseaux sociaux.
Dans les jours qui ont suivi le Brexit, des inconnus témoignent de ce qu’ils ont entendu dans la rue. « Signes inquiétants », un album photo Facebook ou sous le mot-dièse #PostRefRacism, les photos et vidéos s’accumulent.
Au lendemain du Brexit, le quotidien allemand Süddeutsche Zeitung cible justement l’enjeu britannique :
« L’Europe est un problème secondaire. Le problème principal concerne la quête d’identité des Britanniques. Ils se demandent : qui sommes-nous ? Qui voulons-nous être au 21e siècle ? Alors que la haine a souvent dominé les débats, une chose positive a émergé. Les Britanniques savent maintenant qu’ils doivent redéfinir leur identité nationale. »

La députée travailliste pro-européenne Jo Cox assassinée par un Britannique qui aurait crié « Britain first ! » (« La Grande-Bretagne d’abord ! », qui est aussi le nom d’un parti d’extrême droite britannique).

Hier, un homme (blanc) m'a appelé "l'étrangère".
A voix haute. Ma première expérience du racisme ordinaire, à Londres. Merci le Brexit.

Le plus drôle, puisque complètement contradictoire : "Quitter l'UE ! Plus de vermine polonaise !" (traduites en polonais, sait-on jamais)

Ma fille m'a dit que quelqu'un avait écrit "{nom d'un enfant} retourne en Roumanie !" sur un mur des toilettes des filles, à l'école.

“Une vieille femme dans le bus 134 a joyeusement dit à une jeune femme polonaise et son bébé de descendre et de faire ses valises. Terrifiant.”

"C'est marrant jusqu'à ce que tu marches tranquillement dans la rue Great Portland et que tu entendes quelqu'un chanter "rendez la Grande-Bretagne blanche, de nouveau". Je suis... anxieuse. "

"Putain d'étranger, rentrez dans votre pays". Juste regardez cet incident raciste scandaleux à #Hackney

"Je viens juste de voir un van, plein de mecs, rouler près d'une jeune musulmane et de lui crier à la fenêtre : "dégage, dégage, dégage !" Horrible. #Brockley #Londres

"Ma mère vient de voir un groupe de personne attaquer verbalement une femme polonaise en lui disant de dégager et de rentrer dans son pays, puisque "nous avons gagné"..."
Dans la vidéo à droite, ils sont trois jeunes regroupés dans le fond d’un tram de la banlieue Manchester. Le ton est agressif, ils insultent un autre passage, sans raison. « Sors du tram », lance l’un des jeunes. « Ne parle pas alors que tu n’es même pas d’Angleterre. Retourne en Afrique. Tu es une marionnette. Les immigrés doivent être expulsés ».
« Quel âge as-tu? lui rétorque l’homme visé. 18? 19 ans? Tu es complètement ignorant et pas très intelligent, je suis en Angleterre depuis plus longtemps que toi ». Heureusement, l’échange est ponctué de réactions de soutien de la part des autres passagers.
Et parmi les faits-divers les plus sordides, quatre personnes ont été condamnées pour avoir accroché des tranches de bacon à la poignée de porte d’une mosquée de Bristol et un homme a agressé une enfant asiatique de 4 ans en lui étalant du faux caca au visage. J’ai pas trouvé plus glauque, pour le moment. Faut dire que y’a du niveau.
Deuxième conséquence : le spectre d’une scission interne.
« Coucou, nous on se casse »
Le lendemain du Brexit, Nicolas Sturgeon annonce la couleur. Et la Première ministre de l’Ecosse le répète depuis à coeur joie : elle a pour mandat de faire appliquer la volonté de son peuple. Or toutes les régions écossaises ont voté à majorité pour le maintien dans l’UE. Celle qui avait lancé il y a deux ans un référendum pour l’indépendance de l’Ecosse voit en ce Brexit une nouvelle façon de s’émanciper d’une Grande-Bretagne trop envahissante. Deux jours après le Brexit, un sondage lui donne raison : 52% des Ecossais soutiennent désormais l’indépendance de la nation.
Problème pour Londres : l’économie écossaise est très étroitement liée à celle de l’Angleterre. Et Edimbourg a un avantage : le pétrole de mer du Nord, qui a boosté la ville portuaire d’Aberdeen depuis des décennies, créant en tout plus de 100.000 emplois dans ce secteur.
27 introspections
Les problèmes d’identité de l’Angleterre désunie déstabilisent finalement l’UE dans son ensemble.
D’un côté, c’est pas plus mal. Julian Assange est content : « l’Europe a terriblement besoin de réformes. Mais elle n’y parviendra pas sans un choc. La sortie du Royaume-Uni, qui freine en permanence, pourrait être cet électrochoc qui déclenchera une vraie réforme, pour plus d’intégration politique et de cohérence. »
L’Europe se prend donc une bonne grosse baffe. Sur le coup, dans les 27 autres pays, on condamne la défection british et les sondages nous persuadent que les Européens sont fiers de l’être.
Le seul avantage du Brexit, c’est qu’il aura rendu Jean-Claude Juncker cool pendant 24h. Et ça, c’était pas gagné d’avance. JJC fait le buzz sur la toile, lorsqu’il se lâche et tacle sévère les membres du UKIP qui ont pris la peine de venir en séance.
Je me souviens d’une citation de Stefan Zweig, un poil longue, légèrement complexe. Mais l’idée est là :
« L’égoïsme sacré du nationalisme restera toujours plus accessible à la moyenne des individus que l’altruisme sacré du sentiment européen, parce qu’il est toujours plus aisé de reconnaître ce qui vous appartient que de comprendre votre voisin avec respect et désintéressement. »
L’extrait date de 1934. Ça fait donc un moment que le sentiment européen ne parle plus à grand monde. Et justement ce qui m’étonne, c’est qu’énormément de médias, d’habitude si contradictoires, se positionnent uniformément pro-Europe, scandalisés par le résultat du référendum. Dans les médias français, on se délecte des regrets britanniques. “Oh purée les mecs, regardez, ils s’en mordent déjà les doigts”. Sous le hashtag #Breget, ça n’arrête pas.
Et si c’était contagieux ? Finalement, le Brexit est le symptôme d’une Europe malade, du moins, fatiguée. Faute de remède, les petits rigolos du web se sont mis à trouver des surnoms aux éventuelles futures sorties.
“Frexit”, le mot est lancé par la famille Le Pen. Pas très original. Fradieu, ça passerait mieux ! Ou Fruckoff quand on aime être vulgaire. Dîtes « Merci Internet » ! Le web a trouvé des alternatives pour nos voisins qui voudraient se barrer :
- Noraway
- Byegium
- Departugal
- Italeave
- Finish
- Nethermind
- Austria la Vista
- Polend
- Lossembourg
- Extonia
- Donemark
- Swedone
- Czechout
- Donegary
- Latervia
et par conséquent il ne restera que Germlonely !
Nicola Sturgeon, rebelle (Première ministre écossaise)
« L’Ecosse fait face à la perspective d’être sortie de l’UE contre notre volonté. Je vois ça comme démocratiquement inacceptable.
Je peux par conséquent affirmer aujourd’hui qu’afin de protéger notre situation nous allons commencer à préparer la législation nécessaire pour être en mesure d’avoir un nouveau référendum d’indépendance si et quand le Parlement le décide. »
A lire ailleurs :
Whisky, pétrole et social démocratie… s’il quitte le Royaume, le pays devra surmonter de nombreux défis. A lire sur le site de l’Obs

L'Europe désemparée, façon Roy Lichtenstein
Autre impact : une mer agitée côté finances
24.06. Outch. BREXIT. Le réveil a été douloureux sur les marchés financiers.
30.06 L’UE, terre de risque. Standard and Poor’s dégrade de AA+ à AA la note de l’Union européenne à cause du Brexit.
1.07. Tel un phoenix. Le FTSE 100, l’indice des 100 entreprises britanniques les mieux capitalisées à la Bourse de Londres, et qui s’était effondré après le Brexit, a dépassé le 1er juillet la barre des 6 500 points, qu’il n’avait plus atteinte depuis août 2015. C’est pas le cas du CAC40 français ou du DAX allemand, qui rament depuis le référendum.
4.07 – 8.07 Semaine noire pour l’immobilier. 6 groupes financiers gérant des actifs dans l’immobilier commercial ont été contraints de fermer temporairement. Les investisseurs paniquent.
5 juillet – La plongée continue. La livre a plongé au plus bas depuis 31 ans face au dollar.
19 juillet – Le FMI tacle l’UE. Le Fonds monétaire international revoit sa prévision de croissance pour la zone euro à la baisse. Elle devrait ralentir à 1,4% en 2017 à cause du Brexit.
Toute voile dehors !
La classe politique britannique valse avec le Brexit. D’abord, il y a eu David, mais ça on s’en doutait. Il a pris le large, son honneur sous le bras, conscient d’avoir joué avec le feu et avec les peurs de ses concitoyens. Seul Arnold Schwarzenegger lui vient en aide sur Twitter, comme quoi vraiment, ce post-Brexit conduit à des alliances improbables.

Puis Jeremy Corbyn, critiqué de toute part pour n’avoir pas ouvertement soutenu le camp du maintien dans l’UE. “Qu’on lui coupe la tête !” semblaient hurler les travaillistes au lendemain du vote. Lui fait du hula hoop pendant que ses détracteurs lui cherchent un remplaçant.
Alors que la course au poste de Premier ministre est relancée avant l’heure, les prétendants se bousculent au portillon du 10 Downing Street. Theresa May, Andrea Leadsom, Liam Fox, Stephen Crabb. Des noms inconnus du public européen. Tout le monde attend ce bon vieux Boris Johnson pour mettre un peu de piment à l’histoire. Faut dire que le monsieur est délicat, on a hâte de le voir à l’oeuvre.
Mais l’histoire retiendra cette journée où Boris se défila
Deux heures à peine après que son ancien bras droit dans la campagne pour le Brexit, Michael Gove, s’est présenté de façon tout à fait inattendue, BoJo, lui, a annoncé qu’il y renonçait. On se croirait dans un mauvais épisode de “On a échangé nos mamans”.
Soit il n’a pas eu le courage, soit il a d’autres ambitions soit… (suspens) Boris s’est fait poignarder dans le dos.
C’est pas jo-jo, mais ça fait un peu de politique fiction façon House of Cards, et ça plaît aux journaleux. « Trahison », « traîtrise », « Brexécuté », « Justice ! » La presse britannique n’est pas tendre avec le camp conservateur au lendemain de l’annonce. C’est le moment de sortir le placard à archives : Michael Gove, c’est de toute façon un Judas en puissance. Proche ami de David Cameron, il avait rompu avec lui pour rejoindre le camp du Leave. Et dans son discours, Gove pose un gros stop bien violent à BoJo. « À regret, je suis arrivé à la conclusion que Boris ne peut pas assumer le leadership ou construire une équipe pour la tâche qui nous attend ». Comprendre : c’est un abruti, comment pourrait-il nous sortir de la mouise ?
« Mes amitiés à David Cameron ! Tu es la définition même du super- fonctionnaire dévoué »
Et là on pense à ce génie anonyme qui avait posté le discours de Boris Johnson sur le réseau social porno Pornhub, juste après la victoire du Brexit. On se dit que le titre donné à cette vidéo n’a jamais eu autant de résonance :
« Un idiot britannique blond baise 15 millions de personnes en même temps ! »

A lire ailleurs
« Bassesses et trahisons : le Game of thrones de la politique britannique » sur le site du bureau londonien de France 2
Plus improbable encore, la défection de l’ami Nigel
Figure de proue du Brexit, sans être le leader de la campagne officielle, Farage bataillait depuis plus de dix ans pour une sortie de l’UE. Maintenant qu’il y est parvenu, Monsieur part en vacances. En conférence de presse le 4 juillet dernier, il sort devant une presse éberluée, cette phrase magique :
« Pendant la campagne du référendum, j’ai déclaré que je voulais récupérer mon pays. Maintenant, je dis que je veux récupérer ma vie. »
Bon, le petit loup nous l’a déjà faite. Après les législatives de 2015, il avait annoncé sa démission, choqué de n’obtenir qu’un seul député au Parlement alors que son parti avait tout déchiré : 12,7% des voix, une belle percée eurosceptique qui laissait présager le meilleur pour UKIP. Oui mais voilà, le système électoral britannique est ainsi fait, et la démission de Farage n’y avait rien changé. Et UKIP, fondé en parti sur son charisme de chien-enragé-qui-a-réponse-à-tout, n’avait pas su lui trouver de remplaçant, il était donc vite revenu à sa tête.
Là visiblement, il a l’air bien décidé à aller siroter des Sex-on-the-Beach à Clacton-on-Sea. Cette petite ville de la côte Est l’accueillera les bras grand ouverts : c’est la première circonscription anglaise à avoir un député UKIP, en l’occurrence Douglas Carswell, l’autre figure importante du parti. Et comme on est en politique, forcément, les deux personnages les plus importants du parti ne peuvent pas se saquer. Interrogé par la BBC, Carswell a admis que Farage avait « joué un rôle » dans le tant-attendu Brexit mais que son départ constituait « une énorme chance » pour le parti. Bim.
Sur Twitter, l’opposant de longue date à Farage se marre en apprenant la nouvelle. Réaction de Nigel sur les plateaux télé ? « Je suis heureux qu’il sourie parce que ce n’est pas une chose que j’ai très souvent vue chez lui ». Wow-wow-wow-trop de violence.

Mais rassurez-vous. Depuis sa retraite dorée, Farage prend le temps d’aller sur les plateaux radio. Et pour nous, c’est que du bonheur, surtout quand l’un des auditeurs l’interpelle a priori innocemment sur l’immigration

Ouuuups. Farage est député européen depuis 1999. Il habite Bruxelles effectivement. Et il sent le piège se retourner sur lui. Il réplique savoir parler “un peu” français. Et pour cause.

Oh mec, c’est pas cool, là, tout le monde est au courant que Nigel aime le pinard, il est déjà au fond du trou là, et toi tu l’enterres. Non vraiment, on t’a pas appris à ne pas tirer sur les ambulances ?
UKIP part dans une guerre de succession des plus féroces, et Farage s’est bien gardé de nommer son dauphin. Pour lui, les vacances seront ponctuées de séances parlementaires à Bruxelles et à Strasbourg ! Et oui, il a insisté sur le fait qu’il continuerait de siéger au Parlement européen, jusqu’au départ effectif du Royaume-Uni. Mieux accroché à son siège (et à son indemnité) qu’une moule à son rocher.
Donc si on récapitule :
Début juillet, Cameron s’est barré, Johnson s’est défilé, Farage s’est cassé, et Corbyn est sur la sellette.
Reste Larry.
Vous ne connaissez pas Larry ? Il habite au 10, Downing Street, et lui, c’est bien le seul à vouloir rester. Le chat des Cameron continuera de remplir ses fonctions de premier chasseur de souris du Royaume-Uni, c’est une info exclusive du Guardian. Merci la presse indépendante de nous donner un peu de lol dans ce monde de brutes.


La valse des candidat(e)s
Si tu étais parti en vacances, tu as probablement loupé la nomination express de Theresa May au poste de Première ministre. Alors pour toi, on se la refait :
24 juin : Cameron annonce qu’il va démissionner d’ici à trois mois. Ses ministres se lancent dans la course : à qui le tour ?
Dans les jours qui suivent, les candidatures apparaissent dans la presse :
- Stephen Crabb (ministre du Travail)
- Andrea Leadsom (ministre de l’Energie)
- Liam Cox (ministre de la Défense)
- Theresa May (ministre de l’Intérieur)
- Michael Gove (ministre de la Justice)
mais pas de Boris Johnson, comme expliqué dans l’épisode précédent.
Episode écrit avec Mélanie Chenouard

Mais au fait, pourquoi aucune élection législative n’est organisée ?
C’est vrai ça, l’opposition en réclame une pourtant. Bon, ce n‘est pas forcément l’idée du siècle, quand on sait à quel point les travaillistes sont divisés actuellement (Corbyngate oblige)… Mais pour l’instant, Theresa May a écarté l’idée d’une législative et elle n’est pas tenue d’en organiser une, elle est devenue la cheffe des conservateurs, qui ont gagné les dernières législatives.





En principe, une présélection est réalisée par les députés conservateurs puis parmi les deux finalistes, un ou une Premier(e) ministre est désigné(e) par les 150 000 adhérents conservateurs durant l’été. Mais dans les faits, tout est allé bien plus vite que prévu :
5 juillet, premier tour auprès des députés conservateurs : Liam Fox est éliminé et Stephen Crabb se retire, exprimant son soutien à Theresa May, la favorite.
8 juillet, deuxième tour : deux candidates sont sélectionnées par le parti pour en prendre la tête : Andrea Leadsom (84 voix sur 329) et Theresa May (199 voix). Michael Gove et ses 46 voix, est OUT.
11 juillet matin : MAY-DAY ! Theresa monte dans un train en urgence. Alors qu’elle lançait sa campagne pour devenir cheffe du Parti conservateur au pouvoir, sa concurrente Andrea Leadsom abandonne la partie. Sa raison ? « Les intérêts de notre pays seront mieux défendus par la nomination sans attendre d’un Premier ministre fort, disposant d’un large soutien ». Elle laisse donc un boulevard à May.
13 juillet : Cameron a fait ses cartons du 10 Downing Street, et a remis sa démission à la Reine. Au même moment, Theresa May arrive à Buckingham Palace pour proposer un gouvernement à Elizabeth II, comme le veut le protocole. C’est le treizième gouvernement que la Reine accepte. Pourvu qu’elle ne soit pas superstitieuse.

Cruella May au pouvoir !
Femme au volant
Le bal des candidats pour le poste de Premier ministre a débouché sur la candidature unique de Theresa May, vainqueur par K.O. de tous ses autres collègues.
Bon, alors évidemment, comme le Royaume-Uni n’a connu qu’une Première ministre, et qu’elle a traumatisé les électeurs, la comparaison est vite faite. Maggie Thatcher revient hanter les éditorialistes du monde entier.
On la décrit comme une « femme de poigne » : mais WAIT on dirait ça d’un homme ? « Homme de poigne ! » Nooon ça semble évident, c’est inclus dans le package des chromosomes XY en politique avec l’option « voix-gutturale » et « poil-sur-le-torse ».
La suite n’est pas plus reluisante. Thérèse n’a pas d’enfant, alors forcément on en déduit qu’elle se dédie à son travail. Est-ce que quelqu’un a déjà entendu des réflexions similaires à propos du chancelier Kiesinger en Allemagne ? Ou d’Emmanuel Macron en France ?
Theresa May n’a pas d’enfants certes mais elle a tout de même un vagin. Et ouais, en politique ça change toujours pas mal de choses. Ce que nombre de médias ont noté, discrètement, en la limitant à ses attributs les plus clichés : ainsi, sur France Info, on peut entendre une anecdote des plus cocasses. “Il y a quelques années, elle a fait sensation avec des escarpins à talons aiguille en imprimé léopard assez sexy et on l’a vue aussi en cuissardes saluer la reine. » Sérieusement ? Fashion victim, tant que vous y êtes ? C’est bien connu, une femme, ça se distingue par ses fringues, pas par ses opinions ! En Allemagne ça rappelle cette robe décolletée de Merkel à l’opéra, en France, celle à fleur de Cécile Duflot. C’est bien, le débat avance avec les années, voyez.
D’ailleurs, comme c’est une femme, elle a occupé des postes taillés pour elle de 1999 à 2010 : elle a été successivement chargée de l’environnement, de la famille, de la culture, des droits des femmes et du travail. Un grand classique, ces portefeuilles pour les nanas en politique !
Heureusement, Theresa a fait ses preuves : six ans à un poste ingrat, l’Intérieur. A grands coups de politique anti-migrants, elle gagne en popularité chez les conservateurs. Pas de quotas de réfugiés, suppression du regroupement familial pour les étrangers les plus modestes : Theresa May reste ferme et devient progressivement crédible, monte au sein de son parti pour en devenir l’une des figures marquantes, puisqu’intransigeante.
Au final, moi je trouve qu’elle a le swag. Du moins, la première phrase de son premier discours de candidature l’a. “My pitch is very simple, I’m Theresa May and I think I’m the best person to be Prime Minister. “ Bim. Ça en impose. Simple, efficace. Bon, la suite du discours, ça prend 17 minutes. Et c’est plus plan-plan. Mais c’est une habituée des punchlines comme les journalistes les aiment.
Les coulisses d’un dérapage
Pour convaincre les électeurs conservateurs, « l’outsider » Andrea Leadsom se sent pousser des ailes et n’hésite pas à sortir du lourd en terme d’arguments.

« Être mère me donne un avantage sur May »
PAF. Le 9 juillet, Andrea Leadsom attaque sa rivale sur un des aspects les plus intimes qui soient : son incapacité à avoir des enfants. Et elle met salement les pieds dans le plat. Pour être compétente en politique quand on est une femme, c’est bien connu, il faut être la reine des couches–culottes. Une femme respectable, c’est une femme douce, attentionnée, bienveillante, bref, c’est une maman quoi.
Mrs Leadsom fait les gros titres : non seulement, elle renforce le cliché sexiste qui résume les femmes à leur rôle de mères, mais insulte Theresa May et toutes les femmes qui n’ont pas (ou ne peuvent pas avoir) d’enfants. Un coup bas à la fois mesquin, sexiste et extrêmement maladroit. Mais pourquoi diable a-t-elle dit ça ? Réponse : parce que quand on a des enfants, selon Andrea Leadsom, on se préoccupe plus sincèrement du futur pays. Bien entendu, Internet a réagi, et le hashtag « as a mother » (« en tant que mère ») n’a pas tardé à être lancé.

Un point qu’elle partage avec la chancelière Merkel, les femmes étant régulièrement comparées. Pas pour leur coupe de cheveux (ça aurait été bassement trivial de faire un parallèle capillaire, mais tout est possible après ce que je viens de vous citer) : Mais toutes deux sont classées dans la catégorie “femmes politiques austères / filles de pasteur / peu portées sur les mondanités”.






Une pro-Remain, … sur le papier
Donc si on résume, après une campagne express, les Tories font confiance à une pro-Remain pour mener le Royaume-Uni vers la sortie de l’U.E. Étrange. Les Britanniques seraient-ils tombés sur la tête ?
« Ils sont fous ces Anglais ! »
Il faut dire que sa campagne pour le Remain était plus molle qu’un crottin de chèvre au soleil.
C’était surtout pour soutenir son pote David qu’elle est restée côté Remain, autrement dit, par « loyauté gouvernementale ». Mais au fond d’elle-même, Mrs May n’est pas franchement-franchement fan de l’U.E. Côté immigration, ses positions sont même plutôt proches de celle des Brexiteurs purs et durs.
A l’été 2013, en tant que ministère de l’Intérieur, elle lance une charmante campagne anti-immigration sous forme d’affiches… bienveillantes :

« Vous êtes entrés au Royaume-Uni illégalement ? Rentrez chez vous, ou vous prenez le risque d’être arrêtés. Envoyez « maison » au 78070 pour obtenir des conseils et une assistance gratuits pour vos documents de voyage. »
Début juillet sur Twitter, ils étaient nombreux à se remémorer cette douce initiative de Theresa May. Plus récemment, lors d’un discours qu’elle prononce à l’automne 2015, Theresa May soutient que « l’immigration de masse rend impossible la construction d’une société unifiée « . On comprend mieux pourquoi Theresa n’est pas chaude-chaude pour les quotas d’accueil de réfugiés imposés par Bruxelles, par exemple.
Theresa s’entoure pour lancer le Brexit. Et parmi les privilégiés, on retrouve…
- Andrea ‘maman modèle’ Leadsom à l’Environnement
Si, si. Theresa May a choisi celle qui l’a affectueusement clashée comme ministre de l’Environnement. Mais rassurez-vous, Andrea a dit « pardon » à Theresa, et dans sa grande mansuétude, la Première ministre l’a pardonnée. Non, ceci n’est pas un épisode des Anges de la Téléréalité.
Par contre pour pas mal de monde, la pilule a du mal à passer. D’autant plus que l’environnement, ça n’est pas vraiment un domaine dans lequel Andrea Leadsom fait l’unanimité. Elle avait eu la brillante idée de voter en faveur de la loi sur la chasse à courre en 2011, et de la vente de 258 000 hectares de forêts publiques. Pour couronner le tout, Andrea Leadsom doutait jusqu’à récemment de l’existence du changement climatique. « Le changement climatique est-il réel ? », se demandait-elle innocemment.
D’ailleurs Andrea Leadsom semble faire le maximum pour atomiser le peu de popularité qui lui reste. Peu de temps après sa nomination, elle a replongé. Elle a avancé que les hommes ne devraient pas être embauchés pour garder des enfants. Pourquoi ? Et bien parce que » ça pourrait être des pédophiles ». Raz-de-marée d’indignation sur Twitter, et pétitions en folie pour demander sa démission.
- Philip Hammond, le ministre du Budget à la cool
La nouvelle Première ministre a également nommé Philip Hammond au poste de chancelier de l’Echiquier (ministre des Finances). Elle a donc envoyé George Osborne, fidèle moitié du tandem Cameron, dans les roses.
Dès le lendemain de sa nomination, Philip Hammond a créé la surprise : il a annoncé qu’il n’y aurait pas de plan d’austérité particulier ni de budget d’urgence pour faire face au Brexit. En voilà au moins un qui est détendu.
- David (Davis) contre Goliath : celui qui va devoir mener la bataille du Brexit
On se disait qu’à la base, David dans la vie, n’avait pas beaucoup de chance. Mais en plus d’avoir un patronyme qui ressemble comme deux gouttes d’eau à son prénom, David Davis a été choisi pour organiser le Brexit. C’est donc lui qui va devoir négocier avec Bruxelles. Europhobe historique. Pour info, il est surnommé « Monsieur Non ». Voilà qui annonce la couleur.
- Robert Goodwill, le flic de l’immigration
Son nom de famille signifie « bonne volonté ». Une douce ironie, que les internautes n’ont pas manqué de souligner.
Last but not least :
- He’s baaaaaack
Non, vous ne rêvez pas. Le mec qui a contribué à mener le Brexit à la victoire avant de quitter bravement le navire est finalement nommé ministre au sein du gouvernement May. Et tenez-vous bien : Boris Johnson devient ministre des Affaires Etrangères. C’est vrai que c’est bien connu, BoJo est un excellent diplomate. Ce qui ressemble à une promotion pour BoJo pourrait se révéler en fait un cadeau empoisonné. Déjà, les véritables négociations sur le Brexit seront gérées David Davis et par le cabinet de la Première ministre. Ensuite, rassurez-vous, il n’aura déjà pas non plus le Commerce dans son brodequin, c’est son collègue brexiter Liam Fox qui le récupère au passage. Que lui resterait-il alors ? Le ministère des bourdes et des méprises ? Cela promet bien de la matière pour ce blog, merci Thérèse !

Fun fact du jour
Teresa May ou Theresa May?
Faites bien attention à votre orthographe quand vous écrirez à l’avenir le nom de la nouvelle cheffe du gouvernement !
Elle a une homonyme fort sympathique mais peu habillée… L’annonce de sa nomination au poste de Première ministre a indirectement fortement augmenté la popularité de cette actrice de films érotiques, qui a gagné considérablement de followers sur Twitter ce jour-là.

"Deux hommes ont élevé Simba, et ça s'est bien terminé"
Facile de critiquer !
Feriez-vous un meilleur ministre des Affaires Etrangères que « Boxit » Johnson ? Faites le test ici !
Les hypothèses du post-Brexit
« Brexit signifie Brexit ». La phrase a marqué les esprits. Parce que la redondance a un côté stupide. Parce qu’elle coupe court à tout espoir. Theresa May affirme vouloir respecter la décision de son pays et mettre en application le très poussiéreux-jamais-servi article 50 du traité de Lisbonne. Jamais un pays n’est sorti de l’espace européen ? Wait a minute…
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L’exemple méconnu du Groenland
Pour les fonctionnaires de Bruxelles, le Groenland n’est pas seulement synonyme de grande terre glaciale et désertique. Ce pays évoque surtout un divorce législatif des plus complexes, qui remonte à 1985.
A l’époque, l’ancienne colonie et ses cinquante-six mille habitants décidaient de gagner en autonomie vis-à-vis du Danemark et donc de l’UE, accusée de venir pêcher un peu trop souvent dans leurs eaux. Un référendum plus tard (résultat : 52% pro-sortie, tiens tiens), le Groenland quitte alors la CEE.
Les négociations ont duré -tenez-vous bien- trois longues années et ont nécessité plus d’une centaine de réunions. Pourtant, il n’y avait qu’un point à négocier : le poisson, principale ressource du pays !
L’exemple groenlandais fait dire à Donald Tusk, le président du Conseil européen, qu’un Brexit prendrait bien… sept ans avant d’être officiel !
« Ils disaient tous que le Groenland allait souffrir » et que l’économie allait s’effondrer, raconte Lars-Emil Johansen, ancien premier ministre de l’île. Bon, dans les faits, ça va. Législativement, le Groenland a changé de statut pour devenir une sorte de territoire d’outre-mer pour l’UE. Et dans les faits, le pays n’a pas réellement coupé tout contact avec l’Union, puisqu’il reçoit des aides grâce à ce statut (220 millions pour la période 2014-2020). Mais pas de monnaie européenne, pas de droit européen, pas de bateaux allemands ou britanniques pour aller pêcher dans les eaux du Groenland. Tout bénef’ ? Peut-être. Mais la comparaison est limitée, l’échelle n’étant pas du tout la même entre ces deux territoires. Le Groenland sur la scène internationale, c’est pas vraiment l’équivalent du Royaume-Uni… et d’ailleurs, le fait que la Grande-Bretagne rêve du statut d’un ancien morceau d’empire colonial ne manque pas d’ironie !
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La comparaison norvégienne (facile !)
Au lendemain du Brexit, les partisans du Remain se consolaient en imaginant l’hypothèse d’un arrangement à la norvégienne, tout en épuisant leurs stocks de mouchoirs. L’adaptation norvégienne est en effet un exemple du genre « petite cuisine entre amis ».
La Norvège qui bénéficie de l’Espace économique européen (EEE), mais il n’y a pas qu’elle : le Liechtenstein et l’Islande sont aussi dans ce cas. Or, ce ne sont pas les derniers pays au classement de la prospérité en Europe, ça peut donner envie.
La Norvège est libre :
1) De négocier ses propres accords de libre-échange avec les pays non-membres de l’UE.
2) De ne pas suivre les avis de la Cour européenne de justice.
3) D’accéder au marché intérieur de l’UE.
(et n’est en rien obligée de s’engager en terme d’agriculture, de pêche, de coopération judiciaire, etc.)
Mais tout n’est pas rose, puisque la Norvège doit aussi …
4) Respecter la liberté de circulation du travail / des biens / des capitaux / des services.
Pourquoi ça n’est pas crédible que le Royaume-Uni en fasse autant : parce qu’il veut limiter son immigration, notamment est-européenne.
5) Cracher sa money money money.
La Norvège paie à l’UE un montant deux fois supérieur par habitant à celui versé par le Royaume-Uni, sans siéger parmi les Vingt-huit. Chaud.
Pourquoi ça n’est pas crédible que le Royaume-Uni en fasse autant : c’est la forte contribution financière du pays qui a fini par convaincre les Anglais de se diriger vers la sortie.
- Et pourquoi pas un modèle à la Suisse ?
Des accords bilatéraux sectoriels à volonté. Plus de cent-vingt pour la Suisse, avec un accès au marché unique en prime. En échange ? Les libertés de circulation (travail, biens, services et personnes). Un point noir pour le Royaume-Uni : inutile d’aller plus loin sur cette hypothèse.
- Mais loin des modèles déjà existants, le Royaume-Uni pourrait bien créer son propre statut.
Tel un satellite de l’UE, le Royaume-Uni pourrait chercher à garder de fortes relations financières avec le continent ! Il s’agirait de tout revoir, point par point, et cela pourrait prendre des années. Ainsi, le Canada a mis dix ans pour arriver à un accord de libre-échange avec l’Union européenne. WAIT : DIX ANS ?
Autrement dit, vous avez le temps de vieillir sereinement !

C'est l'article 50 qui le dit
L’article 50 ? C’est simple, il fait cinq paragraphes. Pour une fois qu’un article européen est lisible… Problème : c’est loin d’être un mode d’emploi, puisque les quelques paragraphes qui y sont écrits ne précisent pas grand chose.
- On y parle de « retrait volontaire ». OK, soit.
- Le pays en question « doit informer le Conseil européen de son intention ». NO WAY. Je crois qu’ils ont été mis au parfum.
- « Le Conseil doit ensuite proposer des orientations » vers le retrait. Ouais et d’ailleurs il attend encore votre annonce officielle.
- Une contrainte : « maximum deux ans » pour sortir officiellement, à partir du moment où le pays a notifié son retrait. Le Conseil peut prolonger cette période mais pour cela, il faudra une dérogation des Vingt-sept. Easy !

Le Groenland raffraîchit l'ambiance.
Bon, alors, il arrive ce retrait officiel ?
Les dirigeants européens souhaitent que Londres notifie son retrait de l’Union « le plus tôt possible ».
Du balai !
Mais Theresa May, elle, a fait savoir qu’elle n’en ferait pas la demande « avant la fin de l’année ». Keep calm and eat cookies.

(accent suisse) On preeend not' temps
Le ministre du Brexit, David Davis, n’a pas fini de bosser.

L’inconnu du mois
Si vous arrivez à le reconnaître, deux possibilités : soit vous êtes un pro de la politique européenne et du très sexy Conseil européen, soit vous être originaire de Gand et c’est votre voisin de palier depuis dix ans. Pour votre info, ce haut fonctionnaire belge est partout annoncé comme jeune + brillant + très qualifié + multilingue.
Mais c’est qu’il est assez discret, Didier Seeuws, sur la scène médiatique. Jusqu’ici, il était directeur des départements transport / télécommunications / énergie au Conseil européen. Le genre de poste qui te fait trois lignes sur ton CV rien qu’en l’écrivant. Pratique.
Mais ça, c’était avant ! Avant quoi ? Avant d’être nommé responsable de la « Task Force Brexit », (« force d’intervention du Brexit »). Ouais mec, ça envoie comme titre.
– Tu fais quoi dans la vie ?
– (voix rauque et profonde) Je suis responsable de la Task Force Brexit.
On dirait une réplique de Sylvester Stallone.
De suite, ton quotient sexyness prend dix points, et ce même si tu t’appelles Didier… Mais, dans les faits, tu as le pire job ever. A savoir négociateur en chef d’un accord impossible. Cette « task force sur l’article 50 », nommée par le Commission, a la lourde tâche de produire des propositions législatives menant au Brexit. Nettement moins sexy.
Le concurrent français
Donc a priori, pour gérer les négociations, on a un négociateur en chef. Cool. Sauf que cette nomination côté Conseil aurait énervé la Commission. Laquelle, un mois plus tard, a répliqué en sortant un Français de son chapeau. Mais oui les mecs, battez-vous, grande idée !
C’est ainsi que fin juillet, le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, annonce choisir Michel Barnier pour “mener les *difficiles* négociations sur la sortie du Royaume-Uni de l’UE”. Y’a pas comme un doublon ? Je vois déjà les eurosceptiques pointer cet emploi fictif du bout de leurs doigts (crochus, les doigts, évidemment).
Mais qui va faire quoi ? « La nature des relations futures entre Didier Seeuws et Michel Barnier reste encore à définir », rabâchent les dépêches sans plus de précisions. Well, on dirait que chaque institution a choisi son champion pour mener les discussions en son nom. Le Conseil choisit Didier pour représenter les Etats membres. La Commission, elle, choisit Michel pour se représenter elle-même.
La bête noire des financiers londoniens
Et cette nomination de Michel Barnier, ça reste une belle manœuvre tactique pour agacer les Anglais. Et c’est un beau tacle à la City.
Pourquoi ?
Parce que Barnier, l’ancien commissaire européen aux Finances, est l’architecte de l’Union bancaire européenne. Un épisode durant lequel il a gagné le joyeux titre de « bête noire de la City » de Londres. Imaginez la tête des traders anglais au quinzième étage de leur tour d’ivoire quand on leur a annoncé le cadeau…
En effet, si elle veut rester la première place financière européenne, la City aura besoin d’un « passeport financier » européen, sorte de dérogation pour ses banques et entreprises. La Commission lui répond un truc du genre :
– Ah ouais, tu veux garder tes avantages financiers ? Mouais, on verra si tu le mérites, on t’a mis sur le dos le plus intraitable des négociateurs.
Ce qui fait dire au tabloïd europhobe The Sun que cette nomination est une véritable “déclaration de guerre”.
Pétition, vous avez dit pétition ?
Avant même le référendum du 23 juin, une pétition avait été créée mi-mai, prête à recueillir des millions de signatures pour recommencer le vote en cas de victoire du Brexit « à moins de 60 % des voix ou si la participation est inférieure à 75% ».
Bingo, les deux conditions se trouvent réunies ! Un mois après le vote, le nombre de signataires culmine à plus de quatre millions.
Trois jours après le Brexit, la pétition est donc inondée par des citoyens, des trolls et journalistes aventureux : « Hey regardez les mecs, on a signé en déclarant être britannique même si c’est faux, et ça marche !« . Gé-nies.
Le site a saturé en quelques heures. Parmi les gros trolls qui ont décrédibilisé cette pétition, on trouve :
- Marion Maréchal Le Pen, qui a jugé utile de se faire passer pour Napoléon Bonaparte pour la signer…
- Les hackers de 4chan, des utilisateurs anonymes qui voulaient montrer le trop faible niveau de sécurité de cette pétition en ligne.
Leur technique ? Placer des bots, des logiciels qui se font passer pour des humains. Parmi les faux signataires, on a vu passer…
- Kim Il-Sung, premier dictateur de Corée du Nord, en direct live de son tombeau funéraire. On n’arrête plus la technologie.
- 39 411 habitants du Vatican. Un chiffre étonnant, sachant que la cité papale n’accueille que huit cents personnes sur son saint sol…
La structure officielle, Petitions Commitee, s’en est bien sûr rapidement rendu compte – 4chan étant tout sauf discret lors de ses actions – et la plateforme a signalé avoir été hackée.
96% des signatures viennent tout de même du Royaume-Uni (contre vingt-cinq mille Français, quinze mille Espagnols, et autant d’Australiens et d’Américains, citoyens et robots flippés par le départ britannique).
Mi-juillet, un débat est accordé aux partisans du Remain : rien d’illogique à cela, le gouvernement était contraint de répondre à cette pétition puisqu’elle a reçu plus de cent mille signatures. Mais la discussion qui aura lieu entre les députés britanniques en septembre à ce sujet sera purement rhétorique et les élus ne prendront aucune décision. Cela dit, vu la ligne du gouvernement May, on se demande à quoi servira ce débat…

Bon, ce qui reste étrange, c’est que son créateur est un partisan du Brexit… ! Il voulait une sécurité pour son camp à l’époque où il a créé cette pétition en ligne, et ça s’est légèrement retourné contre lui… Ici ,un portrait de William Oliver Healey par notre confrère de 28 minutes :
GUIDE DE DIPLOMATIE SELON TONTON BORIS
Tout juste nommé ministre des Affaires Étrangères, Boris Johnson s’est retrouvé face à ses anciennes bourdes : en tant que journaliste puis maire de Londres, il s’est plu ces dernières années à qualifier vulgairement ceux qui se retrouvent être aujourd’hui ses collègues. Si toi aussi tu veux te faire remarquer, suis le guide !
La touche populiste
Tu veux marquer ton style, imprimer ton goût pour les parallèles vaseux, affirmer ta résistance à la grosse machine européenne ? Alors toi-aussi, fais une sortie fracassante et populiste en pleine campagne. Il faut des comparaisons simples pour le bas peuple :
« Napoléon, Hitler, plusieurs personnes ont essayé d’unir le continent européen, et ça s’est terminé de manière tragique. L’Union européenne est une autre tentative avec des méthodes différentes. »

Imposez votre vision de l’histoire
Aux Jeux olympiques de Pékin, faites grande impression. Affirmez avec conviction (mais non sans ironie, que c’est bon de rire de temps en temps !) devant une tripotée de faces de citrons que le ping-pong, ou tennis de table, a été inventé au XIXème en Angleterre, lors des dîners mondains… Et profitez-en pour remettre le bon vieux débat sur l’origine de ce sport (Chine ? Grande-Bretagne ?) bondissant à l’ordre du jour. Subtil.

Ca n’a pas loupé ! Pour sa première conférence de presse, Boris s’en est pris plein la face. Un journaliste américain a lancé la fronde. « Vous avez accusé le président américain Barack Obama d’avoir une ‘aversion ancestrale pour l’empire britannique’ parce qu’il était ‘en partie kényan' », a-t-il avancé avant de rappeler l’anecdote Clinton-en-infirmière-psy.

Réponse de Johnson : « J’ai bien peur qu’il existe aujourd’hui un long catalogue de choses que j’ai pu dire ou faire, et qui ont pu être déformées. Cela me prendrait vraiment trop de temps de m’engager dans des excuses globales concernant tous ces propos ».
Pas le time, mec, j’suis ministre maintenant.
Pour sa défense, Boris Johnson joue bien au clown. Il a des antécédents internationaux, positifs aussi. Il parle plusieurs langues, il a grandi entouré d’un père fonctionnaire européen, et reste malgré les apparences quelqu’un d’assez cultivé. Sa capacité à grimacer devant les photographes, sa répartie certaine et son ironie sont d’autant plus facilement médiatisables… une publicité gratuite qui l’aura menée à son poste de ministre. Et pourquoi pas ?!

Didier Seeuws, pro-Conseil Européen
A lire ailleurs :
Ce titre magique de POLITICO résume toute la situation (en anglais) : “How to annoy a Brit — put a Frenchman in charge of Brexit” (« Comment ennuyer un Britannique ? Confiez le Brexit à un Français »)

Michel Barnier, pro-Commission
Pendant ce temps-là, au château …
C’est l’histoire d’un Royaume qui se voulait indépendant. A sa tête depuis 63 ans, une fée aux cheveux blancs mais aux tenues multicolores, qui avait pour grand pouvoir de savoir se taire en toute circonstance.

Silencieuse quelle que soit la crise, Elizabeth II s’était bien gardée de donner son avis sur le Brexit, même si de petits plaisantins essayaient de lui faire dire ce qu’elle n’exprimait pas. Comme le Sun, qui en mars dernier sortait une couverture racoleuse insinuant qu’elle était pour la sortie de l’UE… Mais son porte-parole avait de suite dénoncé des « ragots fallacieux »…
Son petit fils, William, s’était positionné pour le Remain discrètement, mais personne dans la famille n’était allé voter. Bien qu’aucune loi ne l’interdise, une tradition abstentionniste était en vigueur chez les Windsor. Histoire d’être aussi impartiaux que possible sur les affaires politiques et économiques du Royaume.
Comme personne ne savait ce qu’elle pensait, les internautes avaient tenté de faire parler son portrait…
Et puis soudain, un beau matin, la Reine a eu peur. Son beau royaume risquait d’être fracturé alors elle a osé une déclaration. Là vous vous dîtes “enfin, elle ne va pas mâcher ses mots face à la débâcle !”. Ouais ouais… C’est la Reine, hein, ça reste mesuré, ne vous enflammez pas. Face aux revendications indépendantistes de l’Écosse, elle a simplement appelé les dirigeants écossais à ne pas prendre de décision précipitée : « Ce qui fait la qualité des dirigeants dans un monde qui va si vite est d’accorder une place suffisante à une réflexion et une méditation tranquilles, susceptibles de permettre un examen plus profond, plus calme, de la meilleure façon de traiter les difficultés et les opportunités ».
C’est l’histoire d’un Royaume qui se voulait indépendant, mais qui allait finir en morceaux, en dépit de la diplomatie royale, beaucoup trop tranquille.
On n'y croyait plus
Les Anglais renoncent à assurer la présidence tournante du Conseil de l’UE de juillet à décembre 2017. Sage décision. L’Estonie reprendra le flambeau, plus tôt que convenu. Theresa May a annoncé mi-juillet la nouvelle par téléphone au président du Conseil européen Donald Tusk, expliquant que son pays serait « très occupé avec les négociations pour quitter l’UE » l’année prochaine à la même époque.
Le conseil le + militaro-stupide
Quoi de mieux pour un diplomate que de savoir manier un fusil d’assaut ? C’est vrai ça, entre deux réunions à l’ONU, ça peut être utile ! Alors fais comme Boris, et pose toi aussi devant les photographes et en costume avec ton AK-47, quand tu débarques aux côtés de combattants peshmergas dans les montagnes du Kurdistan. Cette photo (prise en 2015) fera juste un peu polémique, et vous gagnerez en visibilité.

un vocabulaire des + primitifs
Non mais sérieux, qui s’intéresse à ces peuples primitifs d’Océanie, qui ? Qui connaît la Papouasie-Nouvelle-Guinée, hein, qui ? Pour les éléments de langage, suivez Johnson, encore journaliste en 2006, qui écrit un article plein de sens dans le Telegraph, où il place cette analyse sensible des habitants de l’île : « Depuis dix ans, nous, au parti conservateur, on a l’habitude ‘d’orgies cannibales’ façon Papouasie Nouvelle Guinée, où on exécute les chefs”. Bon, quand les soi-disant cannibales réagiront sans comprendre votre trait d’esprit, soyez sympa, excusez-vous pour le principe. Ils pourraient avoir des ressources rares sous leurs palmiers.
Deux ans plus tard, vous pourrez tranquillement récidiver et vous conforter dans votre position de gros Blanc bien-pensant en traitant les habitants du Commonwealth de « négrillons » et les Africains d’individus aux « sourires de pastèques ».

N’oubliez pas de flatter vos consœurs
Travaillez votre style d’écriture comme Boris, ça pourra servir dans vos discours. Décrivez Hillary Clinton comme « une blonde artificielle, aux lèvres gonflées et au regard bleu d’acier, comme une infirmière sadique dans un hôpital psychiatrique » et vous ferez un carton, notamment le jour où vous devrez la rencontrer, et qu’elle sera devenue Présidente des Etats-Unis.

Depuis quelques semaines, en France, l’écho du Brexit s’estompait tranquillement, noyé par la reprise de la Ligue 1, la rentrée des classes, les nouvelles émissions du PAF et l’annonce en cascade des candidatures aux différentes primaires. On nous servait chaque jour un petit lot d’articles rappelant que le Royaume-Uni faisait traîner sa sortie de l’Union, à tel point qu’on avait presque fini par croire que tout ça, c’était du bullshit. Et puis d’un coup, en moins de temps qu’il n’en faut pour dire fish & chips, Theresa May a réveillé tout le monde. Le 2 octobre, elle a donné la deadline : Brexit means Brexit, et ça commence au plus tard en mars 2017.
ON PÉDALE DANS LA SEMOULE
16% des Britanniques pensaient toujours début octobre que leur pays ne quitterait pas l’Union européenne. C’est pas moi qui le dit, c’est un sondage YouGov publié par le Times. Ça, c’est ce qui s’appelle être dans le déni. Mais d’un autre côté, on les comprend, et il faut admettre que certains ont des arguments béton pour justifier le rétropédalage.
Comme ce jeune homme, dont les parents ont commandé un “Deluxe Brexit” dysfonctionnel, et qui voudrait à tout prix le retourner au magasin. L’argument ? Publicité mensongère.
On le sait, la jeunesse avait massivement voté contre le Brexit (voir l’épisode 2 : Merci qui ?). Pas étonnant que certains ne veuillent pas se résoudre à payer les pots cassés.
Bratislava Boys. Pendant tout le mois de septembre, l’actu du Brexit a sonné comme une grosse farce. Ça a commencé par le fameux sommet de Bratislava, dont on nous rebattait les oreilles depuis plusieurs semaines, et qui n’a finalement rien donné.
C’était le premier sommet européen sans le Royaume-Uni, et l’idée, pour les 27 dirigeants réunis dans la capitale slovaque, c’était de réinventer l’Europe post-Brexit. Rien que ça.
Pour de vrai, personne ne s’attendait vraiment à des déclarations fracassantes, mais le résultat était tout de même un tantinet décevant. Surtout pour Matteo Renzi, le chef du gouvernement italien, pour qui ce sommet n’a été rien de plus qu’une “jolie croisière sur le Danube”. Il n’a pas hésité non plus à clasher Angela Merkel sans prendre de pincettes. Dans une interview accordée au quotidien italien Corriere della Serra, il a déclaré : “Je ne sais pas à quoi Merkel fait allusion lorsqu’elle parle de l’esprit de Bratislava. Si les choses continuent ainsi, au lieu de l’esprit de Bratislava, nous parlerons du fantôme de l’Europe”. Et bim. 1 – 0 pour l’Italie.
La bataille de Liverpool. Pendant ce temps-là au Royaume-Uni, l’opposition faisait sa convention, et des guerres internes menaçaient le Labour d’éclatement. D’un côté les partisans de Jeremy Corbyn, qui représente l’aile gauche du parti et qui était déjà à la tête du Labour depuis un an; et de l’autre, les soutiens d’Owen Smith, jeune député gallois très peu connu du public et plus modéré. Pour résumer, la convention du parti travailliste a été beaucoup décrite comme un combat de la gauche radicale contre l’establishment. Rares étaient ceux qui pensaient que le pauvre Owen Smith avait une quelconque chance de gagner. En réalité, il n’était pas soutenu par grand monde.
Pourtant, Jeremy Corbyn n’a pas que des amis au sein du Labour. Certains le soupçonnent d’être le cheval de Troie du trotskisme, rien que ça. On lui reproche aussi d’avoir été très mou pendant la campagne du parti contre le Brexit. Pas très étonnant quand on sait que Corbyn est un eurosceptique historique. C’est marrant quand même, quand on y pense. La femme chargée de mettre le Brexit en oeuvre était plutôt partisane des arguments du camp adverse pendant la campagne (voir épisode 5 : « Mayday, mayday, une femme au pouvoir ! »), alors que le parti d’opposition, censé faire campagne pour le Remain, avait à sa tête un eurosceptique. Quand on vous dit qu’ils font tout à l’envers, ces Anglais…
« Momentum », l’ami qui lui voulait du bien.
Depuis un peu plus d’an, la menace fantôme d’un mouvement communiste révolutionnaire trotte dans l’esprit des conservateurs britanniques, et de certains travaillistes modérés. Le motif de leurs angoisses s’appelle « Momentum ». C’est un mouvement politique à la gauche de la gauche, créé par des soutiens de Jeremy Corbyn quelques semaines après sa première élection à la tête du Labour, en 2015. Les détracteurs de Momentum craignent que ses membres veuillent phagocyter doucement mais sûrement le parti travailliste. Le péril rouge, quoi. Cette année pendant la campagne, Owen Smith, le rival de Jeremy Corbyn, n’a pas hésité à pointer du doigt ses alliés de Momentum pour s’attirer les bonnes grâces des électeurs travaillistes modérés.

Jackie Walker, ex vice-présidente embarrassante
Cerise sur le gâteau. Pour ne rien arranger à la mauvaise image de « Momentum », l’ancienne vice-présidente du mouvement, Jackie Walker, a été suspendue le 3 octobre pour des propos jugés antisémites. Elle avait affirmé que la journée d’hommage aux victimes de la Shoah devrait être consacrée plus généralement aux autres victimes de génocides. Un enregistrement vidéo de sa déclaration a fuité dans la presse et provoqué l’indignation d’une partie de la communauté juive.
Samedi 24 septembre. Ô surprise ! Jeremy Corbyn a été réélu à la tête du cabinet fantôme, avec 61,8% des voix. Une victoire écrasante, qui n’empêche pas la confusion au sein du Labour. Pour beaucoup, Corbyn n’a pas l’étoffe d’un chef d’Etat, et ne saura pas rassembler les différents partisans. Et puis surtout, en ce qui concerne le Brexit, personne n’est vraiment très très sûr de pouvoir lui faire confiance. Un petit truc important à rappeler : Corbyn n’a presque pas évoqué le Brexit pendant toute la campagne pour sa réélection à la tête du parti. Et c’est loin d’être anodin, parce que c’est comme qui dirait LE défi auquel va faire face le Royaume-Uni pendant plusieurs années. Et globalement, la ligne du Labour à propos du Brexit est loin d’être claire.
3 PETITES PHRASES DES POLITIQUES FRENCHY
Le 27 septembre Nicolas Sarkozy, qui appelait jusqu’alors à une sortie rapide de l’Union européenne pour le Royaume-Uni, retourne sa veste :
“Je dirai aux Britanniques : Vous êtes sortis, mais nous avons un nouveau traité sur la table donc vous avez une opportunité de voter à nouveau. Mais cette fois pas sur la vieille Europe, sur la nouvelle Europe. Voulez-vous rester ? Si oui, tant mieux.”
François Hollande, à Calais le 25 septembre, a dit vouloir démanteler le camp de migrants et a appelé le Royaume-Uni à prendre ses responsabilités malgré le Brexit :
“Ce n’est pas parce que le Royaume-Uni a pris une décision souveraine qu’il est dégagé de ses responsabilités par rapport à la France. J’allais dire : au contraire !”

Benoît Hamon s’empresse de féliciter Corbyn, le 24 septembre. Un internaute lui répond : “C’est pas couillon de féliciter l’un des principaux détonateurs du Brexit ?”

“HARD BREXIT” vs. “SOFT BREXIT”
Côté Tories, tout le monde n’est pas tout à fait tombé d’accord sur la marche à suivre. Certains, comme le trio gagnant composé de Boris Johnson, Liam Fox et David Davis, penchent pour une sortie du marché commun. Bam. D’autres, comme Philipp Hammond, chancelier de l’Echiquier, sont plus chill et seraient prêts à autoriser la circulation des personnes au Royaume-Uni, pour pouvoir maintenir en contrepartie l’accès au marché unique.
Et au milieu de tout ça, Theresa May a parfois eu du mal à maintenir l’ordre. Elle a fermement annoncé que l’article 50 du traité de Lisbonne (qui permet à un pays d’engager son processus de sortie de l’UE), ne serait pas invoqué avant la fin de l’année 2016. Mais en attendant, certains de ses ministres ont eu du mal à garder leur langue dans leur poche et multiplient les gaffes. Elle a déjà rappelé à l’ordre David Davis, qui s’était senti pousser des ailes et avait affirmé, tout seul comme un grand, que le marché unique pourrait être sacrifié par le gouvernement pour limiter l’immigration.
Face aux différentes sorties des Brexiteurs que Theresa May peine à contrôler, un site parodique britannique, le Daily Mash, a publié un faux article plutôt marrant. Le titre : “Theresa May nomme un ministre chargé de contredire les ministres du Brexit”.
Elle a tiré la première. Dimanche 2 octobre, premier jour du congrès conservateur à Birmingham, la Brexiteuse en chef a réveillé son monde en donnant un petit coup de pied sec dans la fourmilière. Theresa May a annoncé la date à laquelle le Royaume-Uni lancerait officiellement le processus de sortie.
Pour les flemmards, voilà un rapide résumé de cette (longue) vidéo :
- Elle est arrivée à la tribune en se marrant, a fait deux-trois petits coucous à la foule qui l’acclamait, et elle a visiblement trouvé les applaudissements trop longs, puisqu’elle a fini par leur faire signe à tous de la fermer.
- Au bout de quelques minutes de discours, elle a répété sa désormais célèbre punchline (qui est surtout une méchante lapalissade) : “Brexit means Brexit”. Comprendre : “non, pour la énième fois, on ne reviendra pas sur les résultats du référendum”.
- Pour elle, le gouvernement a raison de ne pas démarrer le processus de sortie avant la fin de l’année 2016. Mais elle considère que le Royaume-Uni a maintenant prouvé qu’il survivrait très bien au Brexit : elle a évoqué une économie qui “reste forte”, et a lancé une petite pique bien sentie : “le ciel ne nous est pas tombé sur la tête, contrairement à ce que certains avaient prédit” (#hatersgonnahate).
- Et puis, c’est le moment que tout le monde attendait : elle a donné une deadline. “Il n’y aura pas de de délais inutiles avant qu’on déclenche l’article 50 (du traité de Lisbonne). Nous le déclencherons quand nous serons prêts, et nous serons prêts très bientôt. Ca ne sera pas après la fin du mois de mars de l’année prochaine”.
Et paf. Theresa May va “déclencher l’article 50”. Avant mars 2017. Déclencher l’article 50, ça sonne comme “lâcher une bombe nucléaire”, ou “appuyer sur la détente”.
C’est en tout cas l’effet qu’a eu son annonce sur le cours de la livre sterling : le 4 octobre, soit trois jours après son discours, la monnaie britannique atteignait son niveau le plus faible depuis trois ans. La date limite du mois de mars fixée par Theresa May a sévèrement filé les chocottes au secteur économique.

"Stock de Marmite. Si on l'utilise avec parcimonie, on devrait tenir quelques mois".
Sauve qui peut, y’a plus de Marmite !!
De toutes les conséquences du Brexit, celle-ci est probablement la plus grave. Depuis la mi-octobre, certains centres commerciaux sont à cours de Marmite. Pour toute personne normalement constituée, ça serait plutôt une bonne nouvelle, mais pour les britanniques, c’est la panique. Cette sauce couleur mazout à l’odeur immonde dont raffolent les britanniques est en effet produite aux Pays-Bas, et pour compenser la chute de la livre sterling, ses propriétaires ont décidé d’en augmenter le prix. Les centres commerciaux Tesco ont alors stoppé leurs commandes. Panique à bord.
La sortie probable du marché commun, la perspective de dissolution du Royaume, et même Boris Johnson nommé ministre des affaires étrangères, tout ça, à côté, c’est du pipi de chat. Mais là, trop c’est trop. On ne déconne pas avec la Marmite.
Espérons que les britanniques se remettront du choc post-traumatique. Bon courage les gars, on pense à vous.
Jeudi 3 novembre 2016 : Le pire cauchemar de Theresa May et de son gouvernement s’est réalisé, et on pourrait le résumer en deux mots : « souveraineté parlementaire ». On vous l’accorde, ça a l’air plutôt boring dit comme ça, mais en réalité c’est assez brillant et c’est un gros coup de théâtre. Trois juges badass de la Haute Cour de Londres ont rendu une décision primordiale. Ils ont estimé que le référendum du 23 juin, à l’issue duquel le Brexit a obtenu 51,8% des voix, n’était pas intouchable. Bien au contraire.

"Ennemis du peuple"
Selon la Constitution britannique, le gouvernement ne peut pas contredire les lois votées par le Parlement, c’est un de ses principes fon-da-men-taux. On ne déconne pas avec la souveraineté parlementaire. Et le Brexit, figurez-vous, compte indéniablement parmi les trucs susceptibles de changer la loi nationale. CQFD : le gouvernement ne peut pas décider d’enclencher l’article 50 – celui qui permet de mettre le Brexit en route -, sans l’aval du Parlement. Alors, on fait moins les malins hein ?
Mais comment se fait-il qu’on s’en aperçoive seulement maintenant, me demanderez-vous ? En réalité depuis le mois de juin, deux petits groupes d’irréductibles résistent encore et toujours aux Brexiteurs et mènent sans relâche un combat devant la justice pour prouver que le référendum ne suffit pas. L’un de ces deux groupes est constitué de citoyens résidant en France, au Royaume-Uni et à Gibraltar. L’autre est un duo improbable : Gina Miller, femme d’affaires britannique d’origine guyanaise, et Deir Dos Santos, coiffeur. Mais c’est surtout Gina Miller qui est devenue le visage de la résistance au Brexit. Héroïne pour les uns, traitresse pour les autres, elle a fait la une de tous les journaux britanniques après que la Haute Cour de justice de Londres lui a donné raison le 4 novembre dernier.

Gina Miller, la femme qui a bloqué le Brexit
Gina Miller a 51 ans et exerce le métier de « gestionnaire de fortune ». Elle est née en Guyane, a grandi en Angleterre. Son job et son origine guyanaise sont mis en avant par une partie de la presse britannique pour la décrédibiliser aux yeux du lectorat pro-Brexit. Le Sun, dont on connait la finesse et l’impartialité, n’a pas hésité par exemple à la présenter comme « une multimillionnaire qui n’est pas née au Royaume-Uni » pour exacerber le ressentiment des partisans du Brexit à son encontre. Ils ont aussi eu le bon goût de noircir volontairement la couleur de sa peau sur une photo (les types ne reculent devant rien).
Le Sun pris en flagrant délit
« Ce qu’a fait le Sun en retouchant la photo de Gina Miller pour rendre sa peau plus noire est tout aussi ignoble que certains comportements dans l’Allemagne des années 1930« , fait valoir un internaute consterné.
Après la décision de la Haute Cour de justice de Londres, qui a estimé que le Parlement devait voter sur la question du Brexit, Gina Miller a reçu des tonnes et des tonnes de menaces de mort.
Son homonyme, la présentatrice américaine d’émissions sportives Gina Miller, en a aussi pris pour son grade et a même raconté à la BBC ce que ça faisait de se faire harceler sur Twitter.
« Les Brexiteurs sont toujours si classes…« , commente cette personne sur Twitter, en référence à l’amas d’insultes et de menaces reçues par l’autre Gina Miller.
Bref, il y eu un gros déferlement de haine, encouragé par les tabloïds présentant (la vraie) Gina Miller comme la femme à abattre. De son côté, elle explique ainsi sa démarche : « Nous estimons que la procédure constitutionnelle adéquate, le vote et l’approbation parlementaire – ainsi que la consultation des administrations dédiées en Ecosse, en Irlande du Nord et au Pays de Galles – doivent être respectés. Si ça n’était pas le cas, le retrait de l’Union européenne ne serait pas conforme à la loi et pourrait faire l’objet de poursuites judiciaires ».
EXIT LE BREXIT ?
On vous voit venir vous, avec vos questions. « Quoi ? Qu’entends-je ? Finalement c’est possible d’annuler le Brexit ? » Ben pas trop, en fait. Certes, la Haute Cour de justice a décidé que le Parlement devrait voter avant que l’article 50 ne puisse être déclenché. Et certes, le Parlement est composé majoritairement de pro-Remain. Mais dans les faits, il a très (très) peu de chances que le Parlement vote contre le Brexit.
A tous ceux qui trouveraient ça étrange et contradictoire, nous tenons à rappeler un principe simple : si un élu pense quelque chose mais que son électorat pense le contraire, il y a fort à parier que l’élu votera pour le contraire de ce qu’il pense afin de ne pas perdre ses électeurs. (Nous, cyniques ? Si peu).
Blague à part, à l’heure où l’on accuse la justice britannique de trahir la volonté du peuple, les parlementaires risquent fort de se ranger du côté du Brexit. Y compris dans l’opposition : le leader des travaillistes Jeremy Corbyn a déjà affirmé sur Twitter qu’il n’essaierait pas de bloquer l’article 50. « Le parti travailliste va se battre pour un Brexit qui marche pour le Royaume-Uni, en faisant passer l’emploi, la qualité de vie et l’économie en premier ».
En résumé : c’est pas demain la veille que le Royaume-Uni viendra se blottir dans les bras de l’Union en demandant pardon.
GROSSE COLÈRE CHEZ LES TORIES
Vous vous en doutez, le gouvernement britannique n’était pas enchanté par la décision rendue le 4 novembre par la Haute Cour de Londres. Après ce revers, Theresa May est de moins en moins en position de force pour négocier le Brexit avec les autres pays de l’U.E. : la décision de la Haute Cour de justice fragilise son gouvernement. Elle a d’ailleurs immédiatement fait appel de cette décision auprès de la Cour suprême, (organe le plus haut placé dans le système judiciaire britannique), qui examinera l’affaire du 5 au 8 décembre prochain. Sortez le popcorn, la décision finale devrait être rendue au mois de janvier. Que la bataille juridique commence !
En attendant, Theresa May use de toute son autorité pour faire pression sur le Parlement : « Les parlementaires qui regrettent les résultats du référendum doivent accepter ce que le peuple a décidé », a dit la cheffe depuis l’Inde, où elle était en visite. Mais ce n’est pas tout : les Tories au gouvernement pourraient employer les grands moyens et organiser des élections anticipées pour assoir davantage leur légitimité. Theresa May avait pourtant assuré à de nombreuses reprises qu’il n’y aurait pas d’élections « avant 2020 ».
L’ÉCOSSE À LA RESCOUSSE
Pour ne rien arranger, la Première ministre écossaise Nicola Sturgeon a récemment déclaré que l’Ecosse allait défendre la décision de la Haute Cour de justice de Londres : « Pour le gouvernement écossais, il est clair que l’activation de l’article 50 va directement affecter les intérêts et les droits en Ecosse ». Nicola Sturgeon entend donc exprimer les « vœux démocratiques » des Ecossais, qui avaient voté à 62% pour que le Royaume-Uni reste dans l’Union européenne.
LE MEILLEUR DES POPULISMES



BREXIT BURGER : LE POINT DONALD TRUMP
À moins que vous ne viviez dans un autre système solaire, vous êtes probablement au courant que Donald Trump vient d’être élu président des États-Unis d’Amérique. Shit happens.
Ce que vous ne savez peut-être pas, c’est que Nigel Farage voudrait être Donald Trump quand il sera grand. Il s’est lui-même décrit comme « le plus grand supporter de Donald Trump au Royaume-Uni ». Et cet amour n’est pas unilatéral : Trump a déclaré à plusieurs reprises pendant sa campagne qu’il allait faire « mieux que le Brexit ».
Après l’élection du candidat républicain, la presse a largement évoqué un « Brexit à l’Américaine » pour qualifier le vote du peuple contre les élites. Brexit et Trump, du pareil au même ?
BRAVO DONALD !
En tout cas, Donald Trump peut compter sur plein de copains bien sympathoches un peu partout dans le monde. Ci-dessous, quelques exemples tout droit tirés du ballet des félicitations intéressées :

Viktor Orban, grand amoureux de la démocratie
« Félicitations. La démocratie est toujours vivante », peut-on lire en description de la photo, sur laquelle on voit Viktor Orban au téléphone avec Donald Trump. Le post Facebook ici.