Monogamia

Dans chaque pièce de l’appartement des parents d’Ohad Milstein, et jusqu’à la cave, placards et tiroirs sont envahis de robes, de chaussures, de sacs et de chapeaux, dont on n’a parfois pas pris la peine d’enlever les étiquettes. À 76 ans, Rita, lèvres gonflées et visage tendu par les liftings, s’épuise dans une fièvre acheteuse jamais assouvie. Face à elle, Avi, époux démuni, semble presque absent. Soupirant devant l’état de leurs comptes – 250 000 shekels engloutis chaque année en emplettes inutiles –, il se contente d’aider sa femme à stocker ses habits au sous-sol dès qu’ils commencent à déborder des armoires… Rita l’avoue bien volontiers : ces achats compulsifs se veulent un remède à la solitude qu’elle éprouve, au manque d’intimité qui la ronge depuis que l'"étincelle" s’est éteinte. Qu’est donc devenu le bonheur conjugal de jadis, si éclatant pourtant sur les films de vacances et les photos sépia ? 
 
Mise à nu 
Après deux documentaires consacrés aux épreuves traversées par son couple – la perte d’un enfant in utero puis l’apprentissage de la parentalité –, le réalisateur Ohad Milstein clôt sa trilogie familiale en filmant ses parents, qu’il amène à se livrer avec une confondante franchise. Il pose sur eux un regard tendre et d’autant plus inquiet que leur situation suggère, en miroir, ce que pourrait un jour devenir sa propre relation avec son épouse Rahel… L’amour peut-il réellement résister à l’épreuve du temps ? Pour cela, faut-il s'autoriser quelques écarts avec la monogamie ? Entre pudeur et tentation voyeuriste, le réalisateur retourne la caméra sur lui-même dans une étonnante mise à nu.