Compositeur et chef d’orchestre à l’influence considérable, Pierre Boulez a révolutionné la musique contemporaine du XXe siècle. Un portrait émotionnel de celui qui fut la figure centrale de l’avant-garde, où pour la première fois l’homme apparaît derrière l’artiste.

En 1957, Pierre Boulez, élève d'Olivier Messiaen, dirige à Los Angeles une de ces œuvres maîtresses : Le marteau sans maître, une pièce qui le place au premier rang des modernistes européens du milieu du XXe siècle. Créateur polyvalent, chef d’orchestre légendaire et théoricien, celui dont on célèbre cette année le centenaire de la naissance exerça aussi une influence incomparable sur la politique culturelle en France. Dogmatique impétueux pour les uns, visionnaire et pédagogue généreux pour les autres, il incitera les hommes politiques à construire, outre des salles de concert idéales, un laboratoire de recherche en musique électronique unique au monde : l’Institut de recherche et coordination acoustique/musique (Ircam) qu’il dirigera dès 1972. "On a un grand musicien comme lui peut-être par siècle, commente le chef d’orchestre François-Xavier Roth. Il a su monter une utopie musicale, et comment la musique devait prendre une place dans la société." Disparu en 2016, Pierre Boulez restera à jamais la figure de l’exigence, celle qui l’a conduit à porter haut ses ambitions pour le développement de la musique contemporaine. Disparu en 2016, le pape de la musique sérielle restera jusqu'au bout le porte-parole infatigable puis le chef d'orchestre de ses propres œuvres et de celles de ses collègues de l’Ircam.

Aller de l’avant
Pour celui dont les enregistrements se sont vendus à des centaines de milliers d'exemplaires, la vie semble surtout marquée par une carrière au succès sans précédent, dans laquelle il semble n'y avoir eu qu'une seule direction : aller de l'avant. "Je suis un compositeur sans biographie", se qualifiait lui-même Pierre Boulez. Si ce documentaire surprenant lui rend hommage en évoquant son impact en tant que compositeur et chef d’orchestre, il tend à prendre à rebours son affirmation, en mettant, pour la première fois, l’homme en lumière derrière l’artiste. Animé d’une détermination totale, hyperactif, Pierre Boulez était aussi traversé par un doute profond sur le sens de sa démarche artistique.Ce portrait sensible de celui qui, malgré son empreinte incomparable, resta toujours d’une rare pudeur, donne la parole à ceux qui l’ont connu et avec lesquels il a collaboré, comme le musicologue Christian Merlin, le critique Mark Swed ou le pianiste Pierre-Laurent Aimard.