American Gangster

Harlem, 1968. Bumpy Johnson, le parrain noir de New York, succombe à une crise cardiaque. Frank Lucas, son garde du corps et confident, veut assurer la relève malgré la concurrence rude pour le leadership de la pègre new-yorkaise. Profitant de la guerre du Viêtnam et de l’épidémie d’héroïnomanie qui sévit aussi bien dans les rangs des troupes américaine que dans ceux des troupes vietnamienne, il organise un trafic de grande ampleur, revendant à bas prix les centaines de kilos d’héroïne pure qu’il importe par voie aérienne. Inconnu des services de police comme des instances de la Cosa Nostra, il devient très vite intouchable. En parallèle, Richie Roberts, inspecteur du New Jersey en plein divorce, se lance dans une mission de démantèlement de ce marché après la mort de son collègue par overdose. S’engage alors un jeu du chat et de la souris entre ces deux solitaires perfectionnistes et violents.

Parrain de Harlem
Réalisateur à la filmographie pléthorique, Ridley Scott (Alien, Blade Runner, Gladiator) s’est ici essayé au film de mafieux, revendiquant l’héritage des maîtres du genre : Coppola et Scorsese. Avec ce récit de l’ascension et de la chute d’un génie du crime, dans un New York gangrené par la corruption, où bandits, policiers et politiques poursuivent comme par fatalité les mêmes desseins criminels, il signe un film noir d’un réalisme et d’une efficacité redoutables. Incarné par un Denzel Washington des grands soirs, pendant afro-américain des ritals de Mean Streets ou du Parrain, Franck Lucas se distingue par la dimension industrielle et financière de son parcours. Recherche de partenaire, gestion des flux de production, extension de son domaine d’activité… l’aventure illicite de ce baron de la pègre en devenir est, pour Ridley Scott, une aventure entrepreneuriale. Ainsi, lors d’une discussion avec Dominic Cattano (Armand Assante), qui organisera la mise sous tutelle de tous les dealers de la ville, Lucas pose le monopole qu’il est en train d’ériger comme une atteinte au principe de libre concurrence, constitutif de la nation américaine. Alors que tous les repères moraux s’affaissent, seule l’intégrité de Richie Roberts (Russell Crowe) semble sauver la vertu. Le flic incorruptible devient, dans cette chasse à l’homme, le plus redoutable des adversaires – au risque de faire payer à ses proches le prix de sa propre violence.