La croisière du "Navigator"

Sur un coup de tête, Rollo Treadway, jeune rentier oisif et décérébré, décide d’épouser sa voisine et de l’emmener en lune de miel à Hawaii. Fille d’un riche armateur, la demoiselle, quant à elle, refuse ses avances. Il se résigne alors à entreprendre la croisière en solitaire. Mais par un improbable concours de circonstances, Rollo se retrouve nez à nez avec la jeune femme sur le Navigator, un navire que le père de celle-ci vient de vendre à un pays en guerre, et qu’une manœuvre de sabotage a envoyé dériver en pleine mer. Seuls à bord au milieu du Pacifique, les deux jeunes gens, aussi patauds l’un que l’autre, doivent organiser leur quotidien et faire preuve d’ingéniosité pour tenter de se sortir de cette malencontreuse situation. 

Civilisation désemparée 
Film préféré et plus gros succès commercial de Buster Keaton, La croisière du "Navigator" met en scène deux personnages au sommet de l’échelle sociale, mais incapables de se faire cuire un œuf ou d’ouvrir une boîte de conserve. Incarnation d’une civilisation désemparée face à la technologie, tous deux parviendront cependant, parfois par hasard, parfois avec une inventivité réjouissante, à retourner à leur avantage les situations les plus périlleuses : un canot de sauvetage qui prend l’eau, un scaphandre défaillant, un canon réfractaire, une horde de cannibales... Exploitant toutes les possibilités de son décor, Buster Keaton déploie une avalanche de gags visuels millimétrés où la poésie le dispute à l’absurde, à l’image de ce duel d’escrime avec un espadon, dans une scène sous-marine d’anthologie.