Guy Bourdin, créateur d'images

Pionnier virtuose, il a révolutionné la photographie de mode. Avec ses images surréalistes, qui semaient le trouble en brisant des tabous dans un art consommé de la transgression, l'autodidacte Guy Bourdin est passé, dans les années 1950, du statut d'enfant terrible à celui de photographe emblématique de l'édition française de Vogue. Face à son objectif, les élégantes posaient devant des carcasses d'animaux, se balançaient dans une cage à oiseaux ou chevauchaient une orque… Lors de ses séances de prise de vues, des mondes macabres, érotiques et ironiques, émergeaient spontanément. "Il se comportait comme un peintre avec son modèle, il vous déstructurait pour ensuite tout reconstruire", observe Jane Birkin. Mais poupées ou créatures fatales, ses représentations ultrasexualisées de la femme ont souvent fait l'objet de controverses.  

Œuvre au rouge 
Qui était Guy Bourdin (1928-1991) ? En interrogeant ses compagnons de route – pairs, stylistes, ex-top models, maquilleuse, actrices… −, Sean Brandt, ancien assistant-photographe du maître, revisite son œuvre "au rouge", scénarisée à l'extrême. Dans un hypnotique déluge de clichés graphiques, teintés d'un humour noir et empreints de mystère, le réalisateur australien brosse un portrait kaléidoscopique d'un créateur d'images qui "a introduit la condition humaine dans la photographie de mode" (selon le photographe italien Oliviero Toscani). Plongée dans l'univers d'un visionnaire buñuelien, abandonné jeune par sa mère, ce beau documentaire explore, sans l'élucider, l'énigme Bourdin, génie solitaire à l'imagination folle, et source d'inspiration, aujourd'hui encore, pour de nombreux photographes.