Rien ne les définit plus que leur tenue noire, de la tête aux pieds. Les manifestants Black Bloc s’invitent depuis le milieu des années 1990 dans les mouvements sociaux du monde entier. Leur crédo ? L’anticapitalisme sous toutes ses formes. Et c’est probablement leur seul point commun. Sylvain Boulouque, enseignant-chercheur sur les questions d’anarchisme à l'université Paris Nanterre, explique que la violence n’est pas le facteur commun à tous les "blackblockeurs", comme il les surnomme. "Ils sont définis par leurs pratiques manifestantes : leur tenue noire et leur message contre la société capitaliste."
Pas de représentant, pas de manifeste
Les premiers groupes Black Blocs ont vu le jour en Allemagne dans les années 1980. Ces anarchistes ont adopté ce nom après que les policiers de Berlin-Ouest les ont qualifiés ainsi. Petit à petit, leurs pratiques manifestantes se sont diffusées, notamment grâce à la culture punk. En 1999, à Seattle, aux États-Unis, ils étaient plusieurs centaines à manifester à l’occasion du sommet de l’Organisation mondiale du commerce. Dorénavant, la grande majorité des sommets "symboles du capitalisme" voient des Black Blocs se former, explique Sylvain Boulouque. "Mais ce qui compte", selon le chercheur, "c’est l’effet de surprise. On ne peut pas savoir à l’avance si un Black Bloc se formera pendant une manifestation."
Ces militants n’ont pas de représentant, ni de manifeste. L’aspect volatile du mouvement est lié à deux caractéristiques : les manifestations auxquelles ils participent se trouvent aux quatre coins du monde et leur origine idéologique varie, allant de l’anarchisme au communisme, en passant par le mouvement léniniste ou encore maoïste. De plus, pour le chercheur canadien Francis Dupuis-Deri, auteur de l’essai Penser l’action directe des Black Blocs, "la nature éphémère d’un [groupe] Black Bloc limite la possibilité pour un individu influent de stabiliser et enraciner son pouvoir, d’imposer sa volonté". Pas de leader donc. Chacun est libre de se rendre à une manifestation, de sortir sa tenue et de se revendiquer comme tel.