Que faire lorsqu’un collègue, ou un artiste en vue, se révèle soudain être un sympathisant des populistes de droite ? En les rejetant, ne leur donnons-nous pas incidemment de la valeur ? Le racisme devient-il ordinaire lorsqu’on accepte des sympathisants de l’AfD dans certains cercles ? ARTE Info en a débattu avec une philosophe autrichienne qui s’intéresse à la cohabitation au sein des démocraties.
Car ces questions se font de plus en plus pressantes, en particulier pour les Allemands des Länder de l’est. Les sondages pour les élections régionales de cet automne dans les régions de la Saxe, du Brandebourg et de la Thuringe indiquent que pour la première fois, l’extrême droite risque d’accéder au pouvoir. Au Brandebourg, l’AfD est actuellement en tête des intentions de votes. En Saxe, les populistes de droite sont au coude à coude avec la CDU au pouvoir depuis la réunification.
La directrice de la bibliothèque en arrêt maladie
L’attitude de la plupart des Allemands vis-à-vis des membres de l’AfD semble hésitante, maladroite. Au travail, dans le privé, dans les universités et les milieux culturels, on oscille entre "une certaine tolérance", l’ignorance, la contestation ou l’exclusion. En témoignent deux affaires récentes. Le premier cas prend place à l’Académie des Beaux-Arts de Dresde. Lors d’élections cantonales, la directrice de leur bibliothèque est candidate "sans étiquette" sur la liste de l’AfD. Elle n’obtient pas suffisamment de voix pour avoir un mandat, mais tout de même assez pour éveiller l’attention. Des étudiants en arts manifestent plusieurs jours, font le blocus de la bibliothèque et placardent partout : "L’Académie ou le parti - il faut choisir !". Ils craignent que la directrice agisse dans l’esprit de l’AfD, ce parti qui prétend distinguer le "bon" et le "mauvais" art. Par ailleurs, l’Union des étudiants considère que l’attractivité de l’Académie de Saxe court un risque. Le recteur soutient la bibliothécaire. Il fait valoir la législation. La liberté d’opinion politique est garantie par la Constitution. Il juge la contestation trop radicale et met en garde contre un règlement de compte personnel. Nerveusement ébranlée, selon l’AfD, la bibliothécaire est actuellement en arrêt maladie.