Olivier Père

Shock Corridor de Samuel Fuller

ARTE diffuse Shock Corridor (1963) de Samuel Fuller lundi 4 juin à 22h50, en version restaurée.

Avec Shock Corridor, Fuller signe ce qui demeure son chef-d’œuvre et son film le plus ambitieux, car presque expérimental selon les canons du cinéma de série B hollywoodien dans lequel Fuller a l’habitude de travailler. Shock Corridor est une épure terrifiante de son cinéma. Fuller propose une allégorie barbare dans laquelle « l’Amérique est devenue un asile d’aliénés », dixit Martin Scorsese (un de ses plus grands admirateurs parmi les cinéastes américains).

Pour gagner le prix Pulitzer, un journaliste se fait interner dans un hôpital psychiatrique où un meurtre a été commis. Shock Corridor condense dans un décor unique et nu (un simple couloir où déambulent des malades en pyjamas) les thèmes et les obsessions de Fuller : le journalisme, la violence, la folie, le racisme. Affranchi des conventions narratives et visuelles du cinéma de genre, le cinéaste signe un film monstre tenté par l’abstraction et le symbolisme le plus furieux, splendidement photographié par Stanley Cortez, le chef opérateur de Welles et de La Nuit du chasseur.

Shock Corridor contient des célèbres plans en couleurs lors de la scène d’hallucination, coupés dans certaines copies, notamment lors de la première sortie du film dans les salles françaises. Elles montrent des images impressionnantes de chutes d’eau et de jungle, en Cinémascope anamorphosé, empruntées à La Maison de Bambou et Tigrero, un film inachevé de Fuller tourné au Brésil en 1955. Leur irruption dans Shock Corridor participe au baroquisme de la mise en scène de Fuller, dont les effets photographiques et les expérimentations ouvrent la voie aux « wonder boys » des années 60 et 70, Frankenheimer, Coppola, Scorsese ou Godard.

 

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