Olivier Père

Nos plus belles années de Sydney Pollack

ARTE diffuse Nos plus belles années (The Way We Were, 1973) de Sydney Pollack dimanche 16 avril à 20h50. Nos plus belles années compte parmi les réussites de Pollack, cinéaste néo-classique attaché à prolonger un certain glamour hollywoodien – il a toujours cherché à travailler avec les grandes stars de son époque – tout en y ajoutant certaines notes critiques. Ainsi, Nos plus belles années s’inscrit dans la tradition des mélodrames et des grandes histoires d’amour du cinéma américain des années 40 ou 50, avec aussi l’ambition d’évoquer le climat politique des Etats-Unis de 1937 à 1950. Nos plus belles années est en effet la première fiction sortie d’un studio à traiter de la sombre période du maccarthysme à Hollywood, lorsque Hubbell Gardiner, aspirant romancier, est invité à écrire pour le cinéma, en pleine « chasse aux sorcières ». Dalton Trumbo, l’une des victimes de cette page noire de Hollywood, a participé au scénario sans être crédité au générique. Cet épisode fut pourtant très réduit au montage par Pollack, au grand regret de Barbra Streisand qui souhaitait que le film reste une œuvre engagée. C’est sans doute la limite du cinéma de Pollack, cinéaste soucieux de ne pas faire de vagues, préoccupé par le succès au point d’accepter parfois trop de compromis. Mais le film gagne en romanesque ce qu’il a perdu en acuité politique, et baigne dans une touchante mélancolie. De leur rencontre sur les bancs de l’université jusqu’à des retrouvailles impromptues devant l’Hôtel Plaza à New York, le film suit la romance contrariée entre Katie (Barbra Streisand) et Hubbell (Robert Redford) que tout oppose au début de leur relation. Elle est juive, militante communiste, exaltée et issue d’un milieu modeste. Il est WASP, apolitique, flegmatique et appartient à la jeunesse dorée. Leur passion amoureuse souffrira de l’idéalisme de l’une et du carriérisme de l’autre. La scène au début du film où Katie observe lors d’une fête pendant la Seconde Guerre mondiale Hubbell en uniforme de la marine, d’un blanc immaculé, assoupi debout au comptoir indifférent à la foule autour de lui résume bien l’originalité de Nos plus belles années. C’est l’homme qui est transformé en icône inaccessible, objet de désir, beauté passive et presque irréelle, tandis que la femme joue le rôle de la combattante en perpétuel mouvement, aimante, maladroite mais forte de ses convictions. Les deux acteurs sont très à l’aise dans leurs personnages. Pollack encourage la nonchalance de Redford, tandis que Barbra Streisand déploie son énergie habituelle. Un beau couple de cinéma.

 

 

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