Olivier Père

Police fédérale, Los Angeles de William Friedkin

Splendor films ressort en salles mercredi 4 janvier un titre phare du cinéma américain des années 80, dans une restauration numérique. Un duo de flics traque un faux-monnayeur maléfique. L’un des deux policiers, une tête brûlée, va dangereusement basculer dans l’illégalité pour parvenir à ses fins et entraîner son collègue dans sa descente aux enfers. Cinéaste de l’expérience des limites, fasciné par la frontière ténue entre le Bien et le Mal, la raison et la folie, le réel et le cauchemar, William Friedkin a réalisé en 1985 avec Police fédérale, Los Angeles (titre français idiot de To Live and Die in L.A.) un de ces meilleurs films, et une étape importante du cinéma criminel américain, qui a rarement montré des antihéros aussi suicidaires. Sous-estimé à l’époque de sa sortie, ce polar urbain qui capte magnifiquement l’atmosphère de la Cité des Anges (Nicolas Winding Refn s’en souviendra pour Drive) est pourtant aussi réussi et surtout encore plus tordu que les titres de gloire de la carrière erratique de Friedkin, L’Exorciste et French Connection. On se situe, comme pour les chefs-d’œuvre du cinéaste à ce jour (Sorcerer, son remake paroxystique du Salaire de la peur et Cruising descente aux enfers d’un flic dans les bas-fonds des clubs gays sado maso de Greenwich Village où rôde un tueur en série) à mi-chemin entre la précision hyperréaliste d’un contexte documentaire, et la plongée fantastique dans l’intériorité de personnages en proie à leurs démons. Le film est devenu emblématique de l’esthétisme des années 80, empruntée aux vidéos musicales dans certaines séquences, à l’instar des polars de Michael Mann. Il est toujours remarquable par la frénésie de son montage, la perversité de son scénario et l’incroyable maîtrise de l’espace dont fait preuve Friedkin. La scène pivot du film est une hallucinante et très longue poursuite en voiture, à contresens sur une bretelle d’autoroute, dans laquelle le cinéaste parvient à effacer le souvenir de la course anthologique de French Connection sous le métro new-yorkais.

Willem Dafoe dans Police fédérale, Los Angeles

Willem Dafoe dans Police fédérale, Los Angeles de William Friedkin

 

Catégories : Actualités

Un commentaire

  1. Bertrand Marchal dit :

    Après avoir vitupérer contre Friedkin, il fallait que je me replonge dans un de ses meilleurs films. Je ne l’avais pas vu depuis très longtemps et j’ai été à nouveau saisi par la maîtrise formelle de ce salopard. Je regrette seulement la maigreur psychologique des personnages. Ce sont des figures, des stéréotypes: le flic intègre, le flic obsédé et revanchard, le criminel sans affects, le FBI qui forcément brouille les cartes, le boss à cheval sur le règlement. Friedkin ne sait pas regarder au-delà des figures qui sont utiles, destinées d’abord à maximiser l’action.

    La fin est une pirouette pas très crédible vu la personnalité faiblarde du flic, mais soit, c’est du cinoche!

    A présent, je vais revoir Traqué qui m’avait laissé une bonne mais vague impression. Sorcerer aura aussi sa deuxième chance.

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