Olivier Père

La Proie de l’auto-stop de Pasquale Festa Campanile

Artus Films édite un inédit en DVD, La Proie de l’auto-stop (Autostop rosso sangue, 1977) de Pasquale Festa Campanile, dans une collection qui comprend déjà La Dernière Maison sur la plage (La settima donna, 1978) de Franco Prosperi. Ce sont deux exemples notoires du filon « Rape and Revenge » à l’italienne, sous-genre que l’on retrouve aussi aux Etats-Unis et dans quelques autres pays d’Europe et d’Asie où la production bis voulait profiter avec opportunisme du succès de scandale rencontré par le film de Wes Craven La Dernière maison sur la gauche (lointainement inspiré de La Source de Bergman) en 1972. Ces bandes souvent crapuleuses déclinent un récit invariable : l’agression sexuelle d’une ou de plusieurs jeunes femmes par des voyous puis la vengeance des victimes – si elles survivent – ou de leurs parents, dans un enchainement inexorable de violence.

La Proie de l’auto-stop se démarque de ce schéma basique en se concentrant sur la relation d’un homme et de sa femme pris en otage par un psychopathe. Il y est question de viol conjugal, de jalousie, de machisme, de jouissance féminine, mais ces thèmes sont abordés de manière choquante et racoleuse, typique du cinéma d’exploitation, même si Pasquale Festa Campanile n’est pas le premier tâcheron venu.

Franco Nero dans La Proie de l'auto-stop

Franco Nero dans La Proie de l’auto-stop

La Proie de l’auto-stop est une étrange incursion dans le road movie et le thriller violent de Pasquale Festa Campanile, auteur italien apprécié pour ses comédies libertines ou psychologiques. On y retrouve pourtant le thème de prédilection du cinéaste, la guerre entre les sexes. Ici, Festa Campanile marche sur les plantes bandes de Sam Peckinpah – avec quelques décharges sanglantes au ralenti – et raconte l’histoire d’un couple en crise qui subit les attaques d’un truand en cavale, dans le désert américain. Le bandit est interprété par David Hess, spécialisé dans les rôles de brutes sadiques depuis son interprétation traumatisante d’un violeur assassin dans La Dernière Maison sur la gauche de Wes Craven. Franco Nero, héros du western et du polar italiens, incarne le mari, un pauvre type alcoolique. Les deux hommes vont s’affronter autour du corps désirable de la jeune épouse, Corinne Cléry (Histoire d’O). Mais le plus cruel et le plus cynique ne sera pas celui que l’on croit. Le film, d’une incroyable noirceur, dresse le portrait atroce d’un phallocrate. Les grandes gueules Franco Nero et David Hess rivalisent en cabotinage épais. La Proie de l’auto-stop est fortement déconseillé à ceux qui considèrent que Elle de Paul Verhoeven est un film misogyne et pro viol. Ils risquent de passer un très mauvais moment devant ce film qui multiplie les scènes et les propos désagréables. La Proie de l’auto-stop dresse un portrait à charge d’un abruti et d’un raté qui traite sa femme – la superbe Corinne Cléry – comme un paillasson. Mais son réalisateur n’hésite pas à exhiber la jeune actrice nue sous tous les angles, et à la placer dans des situations humiliantes. Les dialogues sont d’une grande vulgarité. On a connu le cinéma Festa Campanile plus subtil et séduisant. Mais sa propension à la paillardise et à la provocation s’exprime sans aucune retenue dans La Proie de l’auto-stop. Comme les westerns italiens dix ans plus tôt, ce film a été entièrement tourné en Espagne, mais on peut se laisser piéger par la reconstitution et le choix des extérieurs.

 

La Proie de l’auto-stop figure parmi la dizaine de films (Massacre à la tronçonneuse, Les Guerriers de la nuit, Mad Max ou Zombie pour ne citer que les plus connus) qui furent classés « X » pour violence en France à partir de 1976. La classification « X » de La Proie de l’auto-stop survint en 1978 puis fut abrogé en décembre 1981, après l’arrivée de la gauche au pouvoir. Le film doit surtout sa notoriété à son exploitation en vidéo dans les années 80.

Jaquette de la cassette VHS du film

Jaquette de la vidéocassette VHS du film

 

 

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