Olivier Père

Vincent, François, Paul… et les autres de Claude Sautet

ARTE diffuse ce soir à 20h50 Vincent, François, Paul… et les autres (dans une copie restaurée en HD) dans le cadre de son cycle consacré à Claude Sautet. Sorti en 1974, c’est l’un des plus gros succès publics et critiques du cinéaste français, mais aussi l’objet d’un malentendu tenace qui contrariera longtemps l’image et le statut de Sautet auprès des cinéphiles. œuvre chorale sur plusieurs hommes arrivés au milieu de leur existence, Vincent, François, Paul… et les autres n’est pas pour autant le grand film sur l’amitié masculine tel qu’il a été souvent présenté, ni un portrait complaisant des problèmes professionnels et sentimentaux de bourgeois de la France pompidolienne puis giscardienne. Vincent, François, Paul… et les autres est avant tout un film qui parle de l’échec, de la désillusion et de la haine de soi. Vincent (Yves Montant) est un industriel sur le point de vendre son usine, acculé par les dettes, mais son principal souci est d’avoir perdu la femme de sa vie, qui l’a quitté il y a plusieurs années mais dont il espère encore le retour. François (Michel Piccoli) est un médecin installé qui a trahi ses idéaux de jeunesse pour une existence confortable, inspirant du mépris à son épouse qui le trompe. Paul (Serge Reggiani) est un romancier à sec depuis un premier livre « prometteur » et qui gâche désormais son talent en acceptant des commandes commerciales. On est loin, ou plutôt au-delà de la petite musique consolatrice, des turpitudes de cadres quadragénaires confrontés à l’adultère et à la crise économique, et surtout du film de potes, des rires et des larmes entre deux gueuletons et week-ends à la campagne. Vincent, François et Paul se voient régulièrement mais ils n’en demeurent pas moins seuls, prisonniers de leurs angoisses et de leur honte, impuissants à s’aider entre eux. Film sans concessions sur la bourgeoisie, qui fait preuve d’une grande virtuosité invisible dans sa dramaturgie et sa mise en scène, Vincent, François, Paul… accorde la part belle aux « autres » du titre, et en particulier à Jean (Gérard Depardieu, photo en tête de texte avec Yves Montand), jeune ouvrier qui travaille dans l’usine de Vincent et envisage une carrière de boxeur. Paul, qui refuse d’emprunter le même chemin que son ami, fait de renoncement et de compromis, est sans doute le personnage dont Sautet se sent le plus proche, du moins celui qui détient la vérité profonde du film.

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