Olivier Père

4h44 dernier jour sur terre de Abel Ferrara

Mercredi 19 décembre est sorti sur les écrans français le nouveau film d’Abel Ferrara, découvert l’année dernière en compétition au Festival de Venise, et distribué par Capricci. Courrez le voir si ce n’est déjà fait, il permet de clore de très belle façon l’année cinématographique.

4h44 dernier jour sur terre (4:44 Last Day on Earth) marque le retour de Ferrara dans sa ville, New York, avec son acteur fétiche Willem Dafoe devenu son double cinématographique depuis Go Go Tales et sa nouvelle muse Shanyn Leigh : un film apocalyptique en forme de confession. Un cinéaste toujours passionnant en pleine possession de ses moyens après quelques films malades ou maudits (parmi lesquels le très beau Go Go Tales sorti en 2012 avec beaucoup de retard) et des années d’errance. La fin de notre planète – un non événement – intéresse moins Ferrara que l’état du couple et l’état du monde. Son film enregistre un compte à rebours, sans hystérie et avec une paradoxale douceur, les derniers moments vécus à deux d’une jeune peintre, Skye, et de son compagnon plus âgé qu’elle, Cisco, un ex junkie dont le retour à la vie s’effectue paradoxalement quand nous allons tous mourir.

Dans ce huis clos comme les affectionnent désormais plusieurs grands cinéastes et Ferrara en particulier (question de budget, mais aussi de repli moral et politique vis-à-vis de la société), l’homme et la femme communiquent avec l’extérieur grâce aux nouvelles fenêtres que sont les écrans de télévision et d’ordinateur, via Skype et internet.

Jamais Ferrara n’a été aussi godardien. 4h44 dernier jour sur terre est une sorte de Kammerspiel qui évoque à la fois Le Mépris pour sa radioscopie élégiaque et mélancolique du couple et Film socialisme pour son constat désenchanté d’un monde qui va à sa perte.

Abel Ferrara sur le tournage de 4h44 dernier Jour sur terre

Abel Ferrara sur le tournage de 4h44 dernier Jour sur terre

En mars 2011, nous étions à New York pour rendre visite à Abel Ferrara, en pleins préparatifs de 4h44 dernier jour sur terre dont le tournage allait commencer dans quelques jours. La peinture était fraîche, l’équipe menée par Frank DeCurtis le fidèle directeur artistique s’affairait pour transformer le dernier étage d’un vieil immeuble de Manhattan en loft qui allait servir de décor quasi unique au film, tandis qu’Abel arpentait l’espace, vieux lion toujours prêt à rugir dès qu’il s’agit de tourner. Cinq mois plus tard, alors qu’il était encore en montage, Abel Ferrara recevait le Léopard d’honneur au Festival del film Locarno, et présentait sur la Piazza Grande en avant-première une séquence celle de la dispute où Cisco surpris en train de dialoguer avec son ex-femme sur Skype déclenche la colère et la jalousie de sa jeune compagne.

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