Olivier Père

Le Voyage fantastique de Richard Fleischer et L’Aventure intérieure de Joe Dante

L'Aventure intérieure

L’Aventure intérieure

Voici deux films bien-aimés qui ont frappé les esprits de plusieurs générations d’enfants, d’adolescents et de spectateurs et qui incitent à l’étude croisée même si la comparaison ne tourne pas forcément en faveur du film plus connu et plus ancien. Richard Fleischer est un grand cinéaste mais il assure le service minimum dans cette histoire de miniaturisation et ne livre qu’un petit classique de la science-fiction, pas un chef-d’œuvre du genre comme L’Opération diabolique (Seconds) réalisé la même année par John Frankenheimer ou Le Mystère Andromède (The Andromeda Strain, 1971) de son collègue pourtant moins brillant Robert Wise.

Le Voyage fantastique

Le Voyage fantastique

Une équipe de scientifiques est miniaturisée et injectée dans le corps humain pour tenter une opération chirurgicale délicate. Le Voyage fantastique (Fantastic Voyage, 1966) demeure un titre célèbre et original de la science-fiction. On doit à Richard Fleischer au moins une grande réussite par genre hollywoodien, et il avait déjà signé avant de s’atteler à cette histoire d’exploration du corps humain un classique de l’aventure fantastique, l’inoubliable 20.000 Lieues sous les Mers. L’idée du Voyage fantastique est géniale mais le scénario médiocre. Malgré des images saisissantes le film peine à nous plonger dans les angoisses de la diminution et les vertiges de l’infiniment petit, contrairement à L’Homme qui rétrécit de Jack Arnold. Fleischer concentre tout son talent à la gestion compliquée du tournage de cette superproduction et à l’élaboration des trucages mais renonce à améliorer une intrigue d’espionnage conventionnelle et une interprétation sans relief. Malgré ces handicaps Le Voyage fantastique est l’un des premiers films de science-fiction adulte et ambitieux ayant bénéficié d’énormes moyens financiers trois ans avant le 2001 de Kubrick. Cette volonté de traiter un sujet invraisemblable avec sérieux ne s’affranchit pas totalement du kitsch des films de SF de la décennie précédente et d’un esprit juvénile de bande dessinée. Ainsi Raquel Welch, bien peu crédible assistante de chirurgien, ne rechigne pas à enfiler un bikini pour être bientôt attaquée par des enzymes gloutons. Cela procure toujours son petit effet.

L'Aventure intérieure

L’Aventure intérieure

Sans renier ses émotions d’enfance on aura raison de préférer, une fois n’est pas coutume, le remake à l’original, soit l’excellente comédie de Joe Dante L’Aventure intérieure (Innerspace, 1987) qui s’inspire du film de Fleischer pour un résultat plus inventif, rythmé et poétique, davantage orienté vers l’histoire d’amour et le burlesque que le thriller d’espionnage en pleine guerre froide.

En effet Joe Dante, plus tashlinesque que jamais, transforme une histoire délirante de science-fiction en comédie romantique et vice-versa. Étourdissant.

Le Voyage fantastique

Le Voyage fantastique

Affaibli par l’échec de son très personnel Explorers, Dante accepte de réaliser ce qu’il pense être son premier film « normal », un divertissement de science-fiction produit par Steven Spielberg (comme Gremlins), variation loufoque sur le thème de l’exploration d’un corps humain comme dans Le Voyage fantastique. Hélas pour lui, Dante met les dirigeants des studios une nouvelle fois dans l’embarras avec cette comédie dans l’esprit des cartoons de Tex Avery et des comédies de Frank Tashlin avec Jerry Lewis et Dean Martin. Le film est drôle et réussi mais il est trop cinéphilique pour être vraiment commercial. Dante est à la fois un artisan et un auteur. Le film fourmille d’effets spéciaux qui utilisent les techniques de pointe des années 80 (ils nous paraissent aujourd’hui bien démodés donc charmants) dans le dessein de retrouver la poésie et le côté fauché des séries B des années 50 de Jack Arnold. Mais l’essentiel n’est pas là. L’Aventure intérieure surprend à la revoyure par le caractère audacieux de sa romance. Dante n’est pas un sentimental et il n’a jamais filmé d’histoire d’amour. Ici il invente un trio amoureux original puisque l’ex fiancé de la jolie journaliste (Meg Ryan), le pilote tête brûlée porté sur la bouteille (Dennis Quaid) est injecté dans la fesse d’un caissier hypochondriaque (Martin Short) qui tombe bien sûr amoureux de la fille. À la fin l’antihéros a surmonté ses phobies et trouve le courage de suivre les amoureux enfin réconciliés dans le même plan. Dante transforme la comédie du remariage en éloge du ménage à trois. Parce qu’il ne peut rien raconter comme tout le monde, il fallait à Dante une histoire de sous-marin miniature pour en arriver là.

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2 commentaires

  1. Pinon dit :

    J’aimerais tant revoir ce film de mon enfance

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