Olivier Père

Locarno 2011 Day 11 : Saya Zamurai de Hitoshi Matsumoto

Hier soir sur la Piazza Grande présentation triomphale du nouveau film de Matsumoto. Succès magnifique dont l’intensité était difficile à prévoir car Matsumoto, superstar comique du cinéma et de la télévision au Japon est inconnu dans le reste du monde en dehors de certains cercles de cinéphiles. Il lui a fallu pourtant un seul mot (en italien) pour conquérir le public de la Piazza : « Ottimo » (« excellent ») associé à plusieurs emblèmes à la Suisse (Locarno, le festival, la Piazza Grande, la fondue, DJ Bobo) lors de son discours de présentation, accompagné de son « acteur » Takaaki Nomi et la petite actrice Sea Kumada, dix ans et déjà trois films, sans doute une des plus brillantes interprétations d’enfant de ces dernières années.
Saya Zamurai est sans doute plus facile à résumer, malgré son style visuel et narratif unique, que les deux précédents films de Matsumoto (Dai Nipponjin, Symbol) eux aussi montrés durant le festival. Kanjuro Nomi est un samouraï sans sabre, répudié par tous et errant misérablement sur les routes avec sa fille depuis qu’il a refusé de combattre et abandonné son maître.
Tombé entre les mains d’un seigneur aux désirs excentriques, il doit relever un défi cruel. Il a trente jours pour provoquer un sourire sur le visage mélancolique d’un petit prince, à raison d’une tentative quotidienne durant des festivités. S’il échoue, il sera condamné à se faire « seppuku », soit un suicide rituel par éventration au sabre.
Star de la culture pop japonaise, grâce à ses spectacles et ses émissions à la télévision, mais aussi ses longs métrages de cinéma aux concepts déviants, Matsumoto est une icône comique et un artiste multimédia comme le Japon n’en avait pas connus depuis Takeshi Kitano. Avec Saya Zamurai, Matsumoto s’attaque à un des genres les plus populaires et codifiés du cinéma japonais, le film de samouraïs, régulièrement soumis à de nouvelles variations postmodernes ou néoclassiques. Matsumoto reste fidèle à son humour absurde et à son goût de la construction en sketches, mais il décide d’adopter le registre du film pour enfants, avec une belle relation entre un père et sa fille, cruelle et inversée, et même du mélodrame, avec une fin très émouvante et poétique. Cela n’empêche pas des scènes hallucinantes à la limite du bon sens et du bon goût qui évoquent un Jackass en costumes ou « Intervilles » filmé par Jerry Lewis. C’est aussi la première fois que Matsumoto ne joue pas dans un de ses films, préférant confier le rôle principal du samouraï sans sabre à un acteur non professionnel, Takaaki Nomi, pauvre ère découvert à l’occasion de ses émissions de télévision où il s’amuse avec des personnes choisies dans la rue. Plus classique en apparence que les deux précédents films de Matsumoto, mais aussi plus accompli sur le plan formel, Saya Zamurai n’en demeure pas moins un projet fou, dans sa conception et sa réalisation, puisque Takaaki Nomi ignorait qu’il jouait dans un film pendant la moitié du tournage. Saya Zamurai est le coup de cœur d’une grande partie de la presse suisse et internationale et du public locarnais. OTTIMO !

Hitoshi Matsumoto, régisseur Saya ZamuraiHitoshi Matsumoto. © Festival del film Locarno

Sea Kumeda, actrice de Saya ZamuraiSea Kumeda, la jeune actrice de Saya Zamurai. © Festival del film Locarno

Takaaki Nomi, acteur en Saya SamuraiTakaaki Nomi, acteur principal (malgré lui) de Saya Zamurai. © Festival del film Locarno

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