Olivier Père

Mogambo de John Ford

ARTE diffuse Mogambo (1953) de John Ford dimanche 3 mai à 20h45. Ce safari amoureux est une œuvre à part dans la longue carrière de John Ford. La forme est bâtarde (un pied en Afrique, un autre en studio), mais le propos du film et la direction d’acteur ne sont en rien indignes du génial cinéaste. Bien au contraire.

Grace Kelly et Clark Gable dans Mogambo (1953)

Grace Kelly et Clark Gable dans Mogambo (1953)

Tourné entre Le soleil brille pour tout le monde et Ce n’est qu’un au revoir, Mogambo (1953) est une nouvelle version de Red Dust (1932), un film de Victor Fleming célèbre pour des allusions sexuelles corsées encore possibles avant le durcissement de la censure hollywoodienne. C’est l’histoire lors d’un safari en Afrique d’un marivaudage entre un chasseur de gibier, une séductrice et un couple d’Anglais. L’aventurier (Clark Gable) hésite entre la blonde glaciale (Grace Kelly) et la brune brûlante (Ava Gardner), même si finalement c’est la femme qui choisit. Le film ne manque pas de surprendre par la désinvolture avec laquelle Ford mêle les prises de vues tournées en Afrique et des transparences de très médiocre qualité (le même problème surviendra lors des dernières scènes avec Edward G. Robinson des Cheyennes.) Voilà de quoi choquer les admirateurs du cinéaste qui louent son refus de l’artifice et des conventions. Il n’y a pas de plaisir contemplatif dans Mogambo, contrairement aux grands films de Ford qui accordent une place essentielle aux paysages (voir La Prisonnière du désert ou L’Homme tranquille). L’Afrique de Mogambo frise la carte postale, malgré l’absence de musique exotique, et le film souffre de la comparaison avec Hatari !, le chef-d’œuvre de Howard Hawks qui bénéficiait d’un réalisme presque documentaire. Nous sommes également très loin des États-Unis et de l’Irlande, des récits sur l’armée ou les communautés de pionniers qui ont toujours passionné Ford. Reste l’aventure des sentiments et des relations humaines, et la théâtralité assumée du cinéma fordien. Si le décor laisse à désirer, les corps des acteurs ne montrent aucune défaillance. Le cinéaste analyse le choc des cultures vu à travers le comportement d’un petit groupe d’Occidentaux déracinés, et filme avec beaucoup d’amour et de sensualité Ava Gardner, dans le rôle d’une femme belle et énergique comme il les aimait.

Ava Gardner et Clark Gable dans Mogambo (1953)

Ava Gardner et Clark Gable dans Mogambo (1953)

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