Olivier Père

La Grande Illusion de Jean Renoir

Pour inaugurer son cycle de films autour de la Première Guerre mondiale ARTE diffuse demain soir à 20h45 l’un des chefs-d’œuvre de Jean Renoir et l’un des plus beaux films de l’histoire du cinéma, La Grande Illusion (1937.)

La Grande Illusion raconte, à la fin de la Grande Guerre, les tentatives d’évasion de prisonniers français capturés par les Allemands, dans un camp puis dans une forteresse de haute sécurité dirigée par un officier blessé, von Rauffenstein.

Renoir décrit la fin du monde aristocratique, comme dans La Règle du jeu deux ans plus tard. Jean Gabin (dont la notoriété grandissante permettra au film de se faire), Pierre Fresnay, Marcel Dalio et Erich von Stroheim sont utilisés comme des symboles. Sympathisant communiste, Renoir démontre qu’il existe moins d’incompréhension entre deux aristocrates de nations ennemies qu’entre deux Français de classes sociales différentes. « La grande illusion » du titre, c’est évidemment la guerre. L’intérêt inattendu d’Erich von Stroheim, génial cinéaste américain réduit à l’exil en France, pour le rôle de von Rauffenstein obligera Renoir, admiratif de Stroheim, d’étoffer le rôle, aidé par son acteur qui lui donnera son allure inoubliable, avec minerve de métal et gants blancs.

La Grande Illusion restera le seul triomphe commercial du plus grand des cinéastes français. Salué à sa sortie comme une œuvre importante, le film connut pourtant un long purgatoire. Ce qui était de toute évidence en 1937 un film pacifiste de gauche banni par les fascistes sera interdit en 1940 car jugé démoralisateur à l’arrivée d’un nouveau conflit. Après la Seconde Guerre mondiale La Grande Illusion connaîtra une éclipse, soupçonné d’antisémitisme à cause du personnage du banquier juif incarné par Dalio et accusé par certains d’annoncer et de faire l’apologie de la collaboration. Il faudra attendre les années 50 pour que La Grande Illusion soit définitivement réhabilité et considéré à juste titre comme un classique humaniste d’une grande lucidité politique.

Les admirateurs de Renoir adorent aussi Le Caporal épinglé (1961), autre histoire d’évasion, étude de caractères moins idéologique et dernier long métrage de cinéma du cinéaste, avant son « Petit théâtre » final.

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